Le cannabis est consommé par une proportion de plus en plus grande et jeune de la population. Pour le clinicien, cela remet au premier plan la question de la relation entre le cannabis et la psychose.

Pour le patient déjà psychotique, cette relation est certainement néfaste; le cannabis aggrave la symptomatologie et le pronostic d’une psychose. Une évidence scientifique croissante montre une association robuste et cohérente entre la consommation de cannabis et le développement ultérieur des troubles psychotiques chez la personne saine. Par ailleurs, les progrès dans notre compréhension de la biologie du cannabis permettent de proposer un mécanisme hypothétique plausible, en se basant notamment sur les interactions possibles entre le cannabis et la neurotransmission dopaminergique.

Les psychoses pouvant avoir un impact à long terme, les diagnostiquer aussi rapidement que possible permet d’offrir des soins adaptés aux patients et d’éviter la survenue de complications comorbides. Les médecins généralistes étant souvent sollicités en premier, il est important qu’ils pensent à ce diagnostic chez des patients jeunes, même si les manifestations sont souvent atypiques ou les patients réticents à en parler. Des programmes spécialisés se sont développés dans le monde entier, dotés d’équipes mobiles et de professionnels spécialisés dans ce type de traitements, avec des résultats nettement supérieurs à un coût global moindre que ceux habituels. En l’absence d’une politique nationale claire à cet égard, la Suisse reste mal dotée dans ce domaine bien que des programmes performants existent dans quelques régions.

Les troubles psychiques émergent fréquemment à l’âge du jeune adulte, souvent avant 25 ans. Une détection et une intervention précoces ont un impact positif sur l’évolution des troubles et la qualité de vie. Il est recommandé une prise en charge spécifique à cette tranche d’âge mettant le focus sur la facilité d’accès aux soins, l’adaptation aux problématiques du jeune adulte, avec approches médicale et psychosociale intégrées. En même temps, pour cette population, la détermination d’un diagnostic médical précis ne semble pas essentielle, avec un concept de stade précoce de troubles psychiques sans grande spécificité symptomatique souvent plus adapté. L’Unité de psychiatrie du jeune adulte à Genève s’inspire de ces concepts en visant à proposer aux jeunes adultes présentant des troubles psychiques débutants un large éventail de services, facilement accessibles.

Près de 2 % des adolescents et jeunes adultes présentent des symptômes indiquant un risque élevé de développer une psychose. Outre ce risque se situant entre 20 et 35 %, ces individus présenteront des taux élevés d’autres troubles psychiques et déficits fonctionnels, même en l’absence de transition vers la psychose. Le traitement dans des centres spécialisés peut améliorer l’évolution de ces patients mais les besoins de fournir un accès rapide aux soins doivent être mis en perspective des risques de psychiatrisation prématurée, stigmatisation, et médication inutile. Le projet pluri-cantonal PsyYoung vise à optimiser la détection précoce pour les jeunes, tout en minimisant la psychiatrisation inutile. Ceci sera atteint en améliorant le réseautage de l’ensemble de la chaîne de soins et la mise en œuvre d’un modèle de soins par étapes.

La pandémie que nous traversons ainsi que ses conséquences économiques et sociales augmentent le stress des jeunes et de leurs familles. Pour les jeunes les plus vulnérables, cette situation de stress accru ou cumulé peut être un facteur de risque pour l’émergence ou la rechute de troubles psychiques