Quatre diagnostics seront abordés : premièrement, les tumeurs du testicule, l’orchi-épididymite, l’hydrocèle et la varicocèle. Nous n’aborderons pas le sujet de la torsion du cordon testiculaire déjà traité ici en 2011,1 ni des douleurs scrotales référées2 pouvant révéler des pathologies rachidiennes ou urétérales. Anatomiquement, le scrotum est constitué d’un double sac qui contient les testicules et ses annexes dans différentes enveloppes (cutanée, musculaire, fascias, membrane vaginale). L’épididyme coiffe le testicule postérieurement et rassemble l’ensemble des canaux testiculaires dans lesquels sont véhiculés les spermatozoïdes. Ces canaux convergent dans la queue de l’épididyme pour n’en faire qu’un seul : le canal déférent. Il va s’unir en amont du testicule aux éléments vasculo-nerveux pour former le cordon spermatique, qui poursuit son trajet jusqu’au canal inguinal (figure 1).
L’anamnèse et l’examen clinique orientent prioritairement le diagnostic. L’inspection recherche une rougeur, un écoulement urétral, une ascension d’un testicule. La palpation commencera par le côté a priori sain. Elle sera bimanuelle et s’attachera à palper le testicule et l’épididyme (figure 2).3 On recherche une sensibilité et/ou une tuméfaction, ainsi qu’un éventuel nodule induré, additionné d’un contrôle des orifices herniaires. L’échographie scrotale est l’examen complémentaire de choix, car les testicules sont très superficiels, ce qui permet une évaluation parenchymateuse précise. Associée au Doppler couleur, elle permet également de visualiser la vascularisation testiculaire aussi bien focalement (orchite, tumeur) que globalement (torsion testiculaire).
Tumeur de l’homme jeune (15-35 ans), elle représente 1 à 1,5 % des cancers masculins, soit trois à dix nouveaux cas/100 000 hommes/an.4 Les tumeurs germinales du testicule (TGT) en constituent 90 à 95 %.5 Elles regroupent les tumeurs germinales séminomateuses (TGS) soit le séminome, et les tumeurs non séminomateuses (TGNS) : carcinome embryonnaire, tumeur du sac vitellin, tératome, chorio-carcinome, ainsi que les formes mixtes. Les autres tumeurs correspondent à des néoplasies à cellules non germinales (tumeur à cellules de Leydig, tumeur à cellules de Sertoli, tumeur de la granulosa) ou encore à un lymphome, une tumeur carcinoïde, un sarcome, ainsi que des métastases.
A l’examen, il existe un nodule, dur, possiblement irrégulier, voire une augmentation de taille de toute la glande. Des facteurs de risque tels qu’un antécédent de tumeur controlatérale, antécédent familial, une cryptorchidie sont parfois retrouvés.4,5 A l’échographie, l’image typique consiste en une plage hypo-échogène (figure 3) bien délimitée et hyper-vascularisée (Doppler). Le dosage des trois marqueurs tumoraux sériques, alpha fœto-protéine (AFP), gonadotrophine chorionique humaine totale (hCG totale) et lactate déshydrogénase (LDH) est nécessaire au bilan initial. Un scanner thoraco-abdomino-pelvien à la recherche de métastases complète obligatoirement le bilan.
Le traitement est initialement chirurgical : on pratique une orchidectomie radicale par voie inguinale. La mise en place d’une prothèse testiculaire en silicone est réalisée simultanément selon les désirs du patient, ainsi que la création d’un accès veineux (port-à-cath) si la présence de métastases au CT fait d’emblée poser l’indication à une chimiothérapie. Le pronostic sera dicté par le stade, qui est fonction de l’histologie, de l’extension locale et à distance (TNM) et des marqueurs tumoraux. La suite de la prise en charge est résumée dans la figure 4.4 Une réunion multidisciplinaire a lieu pour chaque cas (Tumor Board). La chimiothérapie associe bléomycine, étoposide et cisplatine. Les séminomes sont très radiosensibles, mais du carboplatine peut être aussi utilisé. Les tumeurs germinales bénéficient d’un taux de survie remarquablement élevé, de l’ordre de 95 % à cinq ans. Selon l’évolution scanographique du status ganglionnaire, un curage lombo-aortique est parfois réalisé, qui peut être réalisé de façon mini-invasive sous assistance robotisée Da Vinci.4–7
Dans la très grande majorité des cas infectieuse, il s’agit d’une inflammation du testicule et/ou de l’épididyme. Ils peuvent être atteints séparément. L’atteinte est bilatérale dans 10 % des cas.8
Chlamydia trachomatis et/ou Neisseria gonorrhoeae, transmis par voie sexuelle, sont retrouvés typiquement chez l’homme jeune. Les entérobactéries, transmises par voie urinaire rétrograde, sont retrouvées chez l’homme plus âgé. Ils sont favorisés par l’existence d’un obstacle sous-vésical (sténose urétrale, hypertrophie prostatique) ou des manœuvres endo-urétrales (sondage, urétro-cystoscopie). Plus rarement, il peut s’agir d’un acheminement par voie hématogène du virus ourlien, de Brucella ou de Mycobacterium tuberculosis.
Le diagnostic d’orchi-épididymite est clinique devant des signes inflammatoires locaux ou généraux (fièvre) d’intensité variable. L’hémi-scrotum est notoirement sensible, rouge, chaud et la peau scrotale peut être œdémateuse, voire tendue et luisante. Les douleurs scrotales sont souvent intenses, irradiant le long du cordon, d’installation progressive, mais non brutale, par opposition à la torsion. En cas d’orchi-épididymite, l’épididyme et le testicule sont confondus en une masse volumineuse. Une hydrocèle réactionnelle peut gêner l’examen clinique. Classiquement, le soulèvement du testicule soulage la douleur (signe de Prehn positif), permettant de faire la distinction avec une torsion. Il faut rechercher une urétrite ou une prostatite associée (toucher rectal). Un sédiment urinaire et une culture d’urine sont réalisés ; la recherche de germes sexuellement transmissibles se fait en fonction du contexte. L’échographie-Doppler du testicule peut aider lorsque l’examen clinique est non contributif ou lorsqu’une fièvre oscillante vient suggérer la présence d’un abcès.
L’antibiothérapie débute dès la bactériologie effectuée et sera secondairement adaptée à l’antibiogramme. Le choix de l’antibiotique s’apparente à celui des prostatites : on utilisera des quinolones en première intention. La durée doit être suffisamment longue, soit quatorze jours pour une épididymite simple ou trois semaines s’il existe une prostatite associée, voire jusqu’à six semaines s’il y a eu des antécédents identiques. Cette longue durée est dictée par le fait que les organes concernés sont parenchymateux, ce qui rend le nettoyage antibiotique beaucoup plus difficile que pour un organe creux comme la vessie. En cas de suspicion de maladie sexuellement transmissible (MST), le traitement est identique aux urétrites : ceftriaxone (gonocoque) 500 mg en 1 injection IM + azithromycine (Chlamydia) 1 g mono-dose suivi d’un traitement de doxycycline 200 mg/j pendant dix jours ou d’ofloxacine 200 mg 2 ×/j pendant dix jours. Le préservatif jusqu’à la fin du traitement est de règle, ainsi que le dépistage de la partenaire. L’antalgie nécessite un suspensoir ou slip serré, du repos et des anti-inflammatoires non stéroïdiens.
Le recours à la chirurgie est rare, en cas de nécessité de drainage d’un abcès, d’exérèse d’une zone de nécrose. Plus rarement, on réalisera ultérieurement une vasectomie (récidives) ou une épididymectomie, voire une orchi-épididymectomie. A distance de l’infection, il faut rechercher une uropathie obstructive infravésicale favorisante, en faisant réaliser une débitmétrie.
L’hydrocèle est une accumulation de liquide intravaginal entre le testicule et son enveloppe, la vaginale (figure 1). Chez l’enfant, elle est due à la persistance du canal péritonéo-vaginal. Chez l’adulte, elle est le plus souvent idiopathique et due à une sécrétion excessive de liquide par la vaginale.9
Elle peut également être réactionnelle à d’autres pathologies comme une orchi-épididymite, une torsion du cordon spermatique, un traumatisme testiculaire ou un cancer du testicule. Le spermatocèle, ou kyste de l’épididyme, est une collection aux dépens de sa tête.
Cliniquement, il y a augmentation très lentement progressive, indolore et asymétrique du volume scrotal. La transillumination est positive : une source lumineuse en arrière du scrotum laisse passer la lumière à l’inverse d’une hernie ou d’une tumeur. La tuméfaction du spermatocèle est paratesticulaire, le long de l’épididyme et non tout autour de la gonade, comme lors d’une hydrocèle.
L’échographie est l’examen de référence en cas de doute diagnostique. Elle met en évidence une lame d’épanchement dans la vaginale ou un kyste de l’épididyme. Elle confirme que les testicules sont normaux et recherche une pathologie sous-jacente en cas d’hydrocèle réactionnelle. Un traitement par ponction n’est pas recommandé, car il expose au risque de récidive et d’infection. Lorsque la gêne mécanique devient prépondérante, le traitement est chirurgical. Une incision scrotale permet un accès à la membrane vaginale qui doit être de principe réséquée car à l’origine de la production liquidienne inadéquate. Chez l’enfant, la voie d’abord est inguinale puisque le principe est de ligaturer le canal péritonéo-vaginal.
Le plexus pampiniforme est dilaté à cause d’un reflux sanguin provenant de la veine spermatique. L’incidence dans la population générale est très élevée, de l’ordre de 15 %,10 essentiellement à gauche ; elle double chez les infertiles.10 La gêne est le plus souvent vespérale et en orthostatisme. Tous les hommes porteurs de varicocèle ne sont pas hypofertiles, mais nombreux sont ceux à avoir un sperme anormal (oligo-asthéno-térato-spermie).9 Plusieurs mécanismes sont évoqués, probablement intriqués : stase veineuse, hypoxie testiculaire, augmentation de la température scrotale, reflux de métabolites toxiques des reins.
Cliniquement, on constate une tuméfaction postéro-supérieure au sein de laquelle on peut faire rouler sous les doigts les varices veineuses (« sac de vers ») qui diminue, voire s’efface en décubitus. La classification de Dubin et Amelar est indiquée dans le tableau 1.11–13
L’échographie scrotale révèle des images hypo-échogènes rétro-testiculaires et intrafuniculaires dont le diamètre augmente au Valsalva. Le Doppler objective le reflux veineux. On recherche également une tumeur rénale gauche, le drainage de la veine spermatique s’abouchant dans la veine rénale pouvant être obstrué par un thrombus tumoral provenant d’un cancer rénal.
Le traitement dicté par la douleur ou l’infertilité relève soit de la chirurgie, soit de la radiologie interventionnelle. Il n’y a pas de raison de traiter un homme infertile s’il n’y a pas d’anomalie du spermogramme. Chez l’adolescent, l’indication est surtout la prévention de l’atrophie testiculaire. Chirurgicalement, on interrompt le reflux veineux spermatique,13 le drainage du testicule étant dès lors assuré par la veine déférentielle. Ceci peut être réalisé sur le tronc veineux principal, soit à ciel ouvert par un petit abord iliaque rétropéritonéal (technique de Palomo), ou par laparoscopie par clippage sélectif, cette dernière permettant d’épargner l’artère. L’abord laparoscopique14 a contribué à alléger le taux global des complications chirurgicales. Parmi les complications classiques, on relève notamment un faible risque d’hydrocèle réactionnelle ou d’atrophie testiculaire.
On peut également pratiquer par radiologie interventionnelle une embolisation de la veine spermatique et ses collatérales. Les risques sont la thrombose de la veine rénale, lombaire ou du plexus pampiniforme (douleurs scrotales). L’inconvénient est l’exposition du patient aux radiations ionisantes. Elle est généralement préférée lors des situations de récidive, car elle permet d’identifier les trajets veineux aberrants restés ouverts. Pour ces deux types de traitement, le risque de récidive ou d’échec est globalement de 10 %.
L’origine de la douleur et/ou tuméfaction scrotale est extrêmement variée et reste un motif de consultation fréquent. Le diagnostic différentiel est large ; il est classiquement résolu par l’anamnèse, l’examen clinique ainsi que la biologie paraclinique classique. En cas de doute, l’échographie scrotale apporte les éléments discriminatifs permettant la suite de la prise en charge.
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.
▪ Toute tuméfaction testiculaire non inflammatoire et afébrile doit faire évoquer une tumeur
▪ L’orchi-épididymite est en rapport avec des germes sexuellement transmissibles chez les patients à risque, ou des entérobactéries chez les patients souffrant d’une uropathie obstructive
▪ L’hydrocèle et le spermatocèle sont bénins et traités chirurgicalement en cas de gêne
▪ La varicocèle est fréquente mais traitée seulement si symptomatique ou associée à un trouble de fertilité. Si elle est d’apparition relativement subite, une échographie rénale est nécessaire
▪ Une douleur subite et aiguë doit faire suspecter une torsion testiculaire