C’est la première photographie officielle des évolutions de la consommation de tabac et d’alcool dans la France confinée.1 « Le confinement vécu depuis quelques semaines est une expérience inédite pour tous » explique-t-on auprès de Santé publique France (SpF) qui a lancé une étude en plusieurs vagues auprès de la population pour connaître ses comportements et leurs évolutions. Il apparaît ainsi, d’ores et déjà qu’environ un quart des fumeurs déclare avoir, durant le confinement, augmenté sa consommation de tabac alors que d’autres la diminuait. Il en va différemment avec l’alcool : si environ un consommateur sur dix déclare avoir augmenté sa consommation, près d’un sur quatre assure l’avoir diminuée.
Les fumeurs sont 27 % à déclarer que leur consommation de tabac a augmenté depuis le confinement ; 55 % qu’elle est stable ; 19 % qu’elle a diminué. La hausse moyenne du nombre de cigarettes fumées par les fumeurs quotidiens (94 % des 422 fumeurs interrogés) est de cinq cigarettes par jour. L’augmentation de la consommation de tabac est plus fréquemment mentionnée par les 25-34 ans (41 %), les actifs travaillant à domicile (37 %). Rien n’est dit sur la réduction des risques associée au vapotage et à la cigarette électronique.
Près d’un quart des 1344 consommateurs interrogés disent avoir diminué leurs apports en boissons alcooliques. Ils sont 11 % à déclarer que leur consommation d’alcool a augmenté depuis le confinement ; 65 % qu’elle est stable et 24 % qu’elle a diminué. Parmi ceux qui déclarent avoir augmenté leur consommation 51 % précisent avoir augmenté leur fréquence de consommation ; 10 % avoir augmenté le nombre de verres bus les jours de consommation ; et 23 % ces deux paramètres. L’augmentation de la consommation de boissons alcooliques est plus fréquemment mentionnée par les personnes âgées de moins de 50 ans, celles vivant dans une agglomération de plus de 100 000 habitants ainsi que les parents d’enfants de moins de 16 ans.
« L’ennui, le manque d’activité, le stress et le plaisir sont les principales raisons mentionnées par les fumeurs ou usagers d’alcool ayant augmenté leur consommation. On note également que l’augmentation aussi bien pour le tabac que pour l’alcool est corrélée au risque d’anxiété et de dépression » observe Viêt Nguyen Thanh, responsable de l’unité addictions à la direction de la prévention et de la promotion de la santé à SpF.
« A dire vrai, je redoutais des chiffres plus mauvais, nous a expliqué le Dr William Lowenstein, président de SOS Addictions. Et ce à cause de l’effet cumulatif de la pandémie, de sa médiatisation et des comptes-rendus quotidiens oppressants de la morbi-mortalité par la Direction générale française de la santé – le tout associé au confinement, au stress ou à l’ennui. Or seul un quart des fumeurs aurait augmenté sa consommation – et ce après annonce d’un possible rôle protecteur de la nicotine sur la contamination par le SARS-CoV-2 … – et un cinquième l’aurait diminué. Ce n’est certes pas rien, mais c’est moins que ce nous pouvions craindre. »
Pour le Dr Lowenstein il serait désormais utile de disposer des chiffres sur la consommation de cannabis et sur celle des benzodiazépines. « Durant la période que nous venons de vivre, j’ai été parfois été surpris d’entendre des patients “soulagés” par le confinement, confie-t-il. Certains rapportaient la diminution du stress par rapport au travail, d’autres l’allègement des “efforts sociaux” ou des tentations dites conviviales : pas de sorties, pas de tentations pour des patients confrontés à des abus d’alcool ou des abus de cocaïne associée à l’alcool. »
Gardienne depuis bientôt quatre siècles du bon usage de la langue française, l’Académie française vient de recommander de ne plus utiliser qu’au féminin le terme « Covid-19 ». La Covid-19, donc et non plus le Covid-19. On sait qu’il s’agit ici de l’acronyme anglais de « Coronavirus disease 2019 », affection due à l’agent pathogène SARS-CoV-2 (« severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 »).
« Les virus, et les maladies qu’ils causent, portent souvent des noms différents, rappelle l’OMS.2 Les virus sont nommés en fonction de leur structure génétique afin de faciliter la mise au point de tests de diagnostic, de vaccins et de médicaments. Ce sont des travaux réalisés par les virologistes et la communauté scientifique au sens large, et par conséquent, le nom des virus est attribué par le Comité international de taxonomie des virus (ICTV). Le nom des maladies est choisi pour faciliter les discussions sur la prévention, la propagation, la transmissibilité, la sévérité et le traitement. Il est attribué par l’OMS dans le cadre de la Classification internationale des maladies (CIM). »
L’ICTV a ainsi annoncé, le 11 février 2020, que le nom du nouveau virus serait SARS-CoV-2 et le même jour que L’OMS annonçait que le nom de cette nouvelle maladie serait « Covid-19 ». Restait, en langue française, à s’accorder sur le genre. « Covid est l’acronyme de Corona virus disease, et les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation, rappellent les académiciens. On dit ainsi la SNCF (Société nationale des chemins de fer) parce que le noyau de ce groupe, société, est un nom féminin, mais le CIO (Comité international olympique), parce que le noyau, comité, est un nom masculin. »
Certes mais que faire quand ce syntagme est composé de mots étrangers ? Pour l’Académie française le même principe s’applique. On distingue ainsi le FBI (Federal Bureau of Investigation) de la CIA (Central Intelligence Agency). On devrait donc dire la Covid-19, puisque le noyau est un équivalent du nom français féminin maladie. « Pourquoi alors l’emploi si fréquent du masculin, s’interrogent les académiciens. Parce que, avant que cet acronyme ne se répande, on a surtout parlé du corona virus, groupe qui doit son genre, en raison des principes exposés plus haut, au nom masculin virus. Ensuite, par métonymie, on a donné à la maladie le genre de l’agent pathogène qui la provoque. »
Pour autant l’Académie française n’en démord pas : « l’emploi du féminin serait préférable et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour redonner à cet acronyme le genre qui devrait être le sien ». Et de faire savoir, dans la foulée, qu’elle goûte guère l’expression « distanciation sociale » désormais utilisée dans le registre des « gestes barrières » recommandés pour lutter contre la Covid-19. « C’est une transcription de l’anglais social distancing soulignent les académiciens. Elle est assez peu heureuse, et ce, d’autant moins que ce syntagme existait déjà avec un tout autre sens. On le trouve en effet dans Loisir et culture, un ouvrage, paru en 1966, des sociologues Joffre Dumazedier et Aline Ripert. Distanciation, que les auteurs prennent soin de mettre entre guillemets, désigne le refus de se mêler à d’autres classes sociales. On suppose pourtant que ce n’est pas le sens que l’on veut donner aujourd’hui à ce nom. »
Et l’Académie française d’ajouter que distanciation a aussi connu une heure de gloire grâce au théâtre brechtien – quand il s’agit, pour le spectateur, de donner « priorité au message social ou politique que l’auteur a voulu délivrer ». Mais elle observe qu’il est bien est difficile de croire que ce soit le sens de la « distanciation sociale » dont nous parlent aujourd’hui quotidiennement les autorités sanitaires françaises et leurs messages publicitaires. Et les académiciens de suggérer à ces mêmes autorités de parler de « respect des distances de sécurité », de « distance physique » ou de « mise en place de distances de sécurité ».
« Déconfinement » devrait être le prochain thème traité par cette institution créé par le cardinal de Richelieu et dont la fonction est de normaliser et de perfectionner la langue française. Ou plus précisément, comme l’écrivit Louis XIII le 29 janvier 1635, de travailler à « donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences ».
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