En tant que membres romands de la commission des programmes Sentinella, nous avons lu avec intérêt la suggestion des Drs Bovier et Eggimann d’instaurer une surveillance épidémiologique du COVID-19. Il se trouve que cette surveillance est en place depuis le 21 mars 2020, avec une publication hebdomadaire des résultats sur le site de l’Office fédéral de la santé publique.1 Cette information est effectivement importante pour estimer la circulation du virus dans la population, en combinaison avec les autres systèmes de surveillance existants tels que le système de déclaration obligatoire. Nous ne comprenons donc pas bien la valeur ajoutée par ce qui est proposé par nos collègues.
Rappelons ici les concepts qui sous-tendent ces démarches de surveillance : dans le cas de la grippe saisonnière, le but de la surveillance est d’identifier le début et la fin de l’épidémie saisonnière, afin de permettre aux institutions sanitaires de mettre en place des mesures de contrôles spécifiques au bon moment (par exemple le port du masque par le personnel non vacciné ou la surveillance active au sein des établissements médico-sociaux). Les médecins peuvent intégrer cette information de probabilité prétest dynamique dans l’évaluation d’un·e patient·e présentant un état grippal, ce qui évite de devoir tester chaque patient·e individuellement.
Dans le cas du Covid-19, la stratégie de contrôle est bien différente, puisqu’elle repose sur la détection active des cas (active case-finding). L’objectif est d’identifier un maximum de patient·e·s afin notamment de mettre en place des mesures d’isolement et de quarantaine dans l’entourage et de limiter la circulation du virus. On est là plus proche de la stratégie de contrôle de la tuberculose que de la grippe. Afin que cette stratégie fonctionne, il faut que le plus possible de personnes aient accès à un test diagnostique.
Un système sentinelle est particulièrement utile pour le suivi au cours du temps de maladies fréquentes. Par contre, il n’a pas la sensibilité requise pour identifier les petits foyers d’infection. La priorité actuellement serait donc plutôt de rendre le test diagnostique accessible au plus grand nombre. Dans ce sens, une participation active des cabinets de médecine de premier recours au dispositif permettant de tester à « bas-seuil », sans évaluation médicale systématique, serait évidemment utile.
Pour les médecins souhaitant participer à la surveillance épidémiologique, nous profitons de l’occasion pour rappeler que le réseau Sentinella accueille volontiers de nouveaux membres. Les co-auteures de cet article se tiennent à votre disposition pour tout renseignement complémentaire à ce sujet.