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ISO 690 | Widmer, N., Csajka, C., Grouzmann, E., Decosterd, L., A., Buclin, T., Biollaz, J., Werner, D., Eap, D., C., B., Regli, D., L., Burnand, D., B., Suivi thérapeutique des médicaments (I) les principes, Rev Med Suisse, 2008/165 (Vol.4), p. 1644–1648. DOI: 10.53738/REVMED.2008.4.165.1644 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2008/revue-medicale-suisse-165/suivi-therapeutique-des-medicaments-i-les-principes |
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MLA | Widmer, N., et al. Suivi thérapeutique des médicaments (I) les principes, Rev Med Suisse, Vol. 4, no. 165, 2008, pp. 1644–1648. |
APA | Widmer, N., Csajka, C., Grouzmann, E., Decosterd, L., A., Buclin, T., Biollaz, J., Werner, D., Eap, D., C., B., Regli, D., L., Burnand, D., B. (2008), Suivi thérapeutique des médicaments (I) les principes, Rev Med Suisse, 4, no. 165, 1644–1648. https://doi.org/10.53738/REVMED.2008.4.165.1644 |
NLM | Widmer, N., et al.Suivi thérapeutique des médicaments (I) les principes. Rev Med Suisse. 2008; 4 (165): 1644–1648. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2008.4.165.1644 |
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Requesting a blood level measurement of a drug is part of the global approach known as « Therapeutic Drug Monitoring ». Diverse situations require this monitoring approach, such as inadequate response to treatment or organ failure. Every drug however does not possess all the characteristics for a TDM program. The therapeutic range of a TDM drug has indeed to be narrow and its interindividual pharmacokinetic variability to be wide. As the development of new drugs is currently slowing down, the precise management of existing treatments certainly deserves progress, but needs however to be applied rationally, starting from a valid indication to blood sampling, and ending with a sound dosage adaptation decision.
La demande d’un dosage sanguin de médicament s’inscrit dans le cadre global du « suivi thérapeutique des médicaments » (TDM). Diverses situations motivent une telle démarche, comme une réponse insuffisante au traitement ou une dysfonction d’organe. Tous les médicaments ne possèdent toutefois pas l’ensemble des caractéristiques requises pour un programme de TDM. Ils doivent notamment posséder une marge thérapeutique étroite et une forte variabilité interindividuelle. Alors que fléchit le nombre de nouveaux médicaments commercialisés, le pilotage fin des traitements existants est appelé à connaître d’importants progrès. Il nécessite toutefois d’être pratiqué de façon rationnelle, dès la discussion de l’indication à un dosage jusqu’à la décision d’adaptation posologique.
Le médecin est régulièrement appelé à requérir un dosage sanguin de médicament pour l’un ou l’autre de ses patients. Que peut-il conclure du résultat de la mesure (exemple : 3,5 mg/l) qu’il reçoit, accompagné éventuellement d’un intervalle de référence (exemple : 0,8-2,0 mg/l) ?
Cette démarche s’inscrit dans le cadre global communément appelé « suivi thérapeutique des médicaments » (Therapeutic drug monitoring – TDM).1 Il s’agit non seulement de mesurer des concentrations de médicaments, mais aussi de les interpréter en vue d’individualiser la posologie. Le terme anglais monitoring provient d’ailleurs du latin monere qui signifie « avertir », « rappeler », « souffler », « suggérer une façon d’agir » ou encore « présager ».2
Si dès les années 50, la lithémie était mesurée chez les patients maniacodépressifs, ce n’est qu’au début des années 70 que le terme TDM est apparu dans la littérature, lorsqu’a été comprise l’utilité des dosages sanguins de médicaments dans la prise en charge médicale.3 Initialement limitée au milieu hospitalier, la détermination des taux sanguins a progressivement gagné les laboratoires privés, et même les cabinets médicaux.4 Les progrès réalisés dans les méthodes analytiques permettent actuellement de doser la plupart des médicaments. Un article récent recense ainsi des valeurs de référence pour environ huit cents produits.5 Toutefois, les connaissances nécessaires à leur interprétation rationnelle font encore souvent défaut.
Le but de cet article est de rappeler la signification, les exigences et les limitations du TDM, ainsi que les informations à obtenir et à confronter au résultat analytique. Pour ce faire, nous suivrons le fil des réflexions et des actions déclenchées par une demande de dosage. Un second article exposera les bases nécessaires à une utilisation clinique rationnelle du TDM pour les principales classes de médicaments dosés en Suisse.6
La raison d’être du TDM tient aux questions cliniques auxquelles le dosage d’un médicament peut aider à répondre. Rien ne sert d’envoyer un échantillon de sang au laboratoire s’il n’y a aucune question quant au traitement en cause !
En pratique, la majorité des traitements de longue durée méritent d’être pilotés d’une manière ou d’une autre (exemple : suivi de la glycémie et de l’HbA1c dans le traitement du diabète).7 Lorsque de bons marqueurs pharmacodynamiques font défaut, le suivi des concentrations du médicament (marqueur pharmacocinétique) peut suppléer et contribuer à garantir l’efficacité d’un traitement tout en minimisant la toxicité. Le tableau 1 présente différentes raisons concrètes motivant le recours à un dosage médicamenteux.8
Escompter un bénéfice pour le patient d’un dosage de médicament ne suffit pas à justifier d’emblée un programme de TDM. En effet, la mesure des concentrations sanguines d’un médicament n’a de sens que si ce dernier possède certaines caractéristiques précises (tableau 2).9,10
Ces caractéristiques ne sont de loin pas toutes réunies pour les médicaments qu’il est possible de doser, et font même parfois défaut pour les médicaments qui sont actuellement l’objet d’un TDM régulier.4 De plus, les études contrôlées démontrant l’utilité clinique in fine de ces dosages restent rares.3,11 On assiste toutefois à des développements significatifs dans ce domaine, qui autoriseront sans doute une utilisation plus rationnelle de cet outil.
La décision de doser un médicament implique diverses contraintes relatives au prélèvement sanguin (tableau 3).8,12 Leur application doit rester souple : ainsi, pour des médicaments à très longue demi-vie, il peut s’avérer utile de doser le médicament avant l’état d’équilibre, à condition de prendre en compte l’impact de l’accumulation sur les taux attendus au long cours afin d’éviter une intoxication en cas d’insuffisance rénale ou hépatique (exemple : phénobarbital). De même, lorsque le contrôle thérapeutique est difficile, un prélèvement anticipé est envisageable après une dose de charge (exemple : traitement de la fibrillation auriculaire par digoxine). Si le prélèvement n’est pas effectué dans le délai pour lequel des intervalles de référence existent, l’interprétation nécessite une approche pharmacocinétique complexe.
Finalement, pour interpréter valablement une concentration, certaines informations doivent être connues (tableau 4) ;8 leur absence ou leur méconnaissance risque fort d’induire des conclusions erronées dans l’interprétation du taux mesuré.
L’analyse des médicaments se fait à l’aide de méthodes diverses. Les plus fréquemment utilisées sont :
Les dosages immunométriques (dosage immunoenzymatique EIA ; dosage enzyme-multiplied – EMIT ; dosage par polarisation de fluorescence – FPIA).
Les méthodes chromatographiques (chromatographie gazeuse – GC ; liquide à haute performance – HPLC).
Les méthodes chromatographiques couplées à une détection par spectrométrie de masse (GC-MS ; LC-MS ; LC-MS/MS, appelée aussi tandem MS).
Ces différentes techniques se différencient notamment par leur spécificité, leur sensibilité, leur complexité, le délai d’obtention du résultat et leur tarification (points OFAS). Les méthodes chromatographiques couplées à la spectrométrie de masse servent souvent de référence car ce sont les plus spécifiques et les plus sensibles, mais elles nécessitent aussi la mise en place d’une technologie poussée et coûteuse. Un taux d’antiépileptique déterminé par dosage immunologique, HPLC ou LC-MS, sera facturé respectivement 40, 80 ou 125 pts OFAS. Pour les médicaments courants, les dosages immunologiques sont de loin les plus utilisés et suffisent au suivi des patients.
L’automatisation des dosages par anticorps (Ac) a grandement facilité le TDM, permettant l’obtention de résultats en urgence, la nuit ou le week-end. Leur désavantage réside dans leur spécificité généralement moindre que celle des méthodes chromatographiques, en raison d’une réactivité croisée possible avec d’autres molécules ressemblantes ou des métabolites actifs ou inactifs. L’importance de ce biais varie selon le test, le type d’Ac utilisé (polyclonal ou monoclonal) et les épitopes reconnus. Par exemple, le taux de ciclosporine d’un même prélèvement clinique déterminé par trois dosages immunologiques différents a donné les résultats suivants : 129 μg/1 (méthode EMIT de Dade Behring, Ac monoclonal), 153 μg/1 (méthode FPIA sur TDx d’Abbott, Ac monoclonal) et 385 μg/1 (méthode FPIA sur TDx d’Abbott, Ac polyclonal).a
Interpréter correctement un taux de médicament implique donc de connaître la méthode utilisée, l’intervalle de référence étant souvent fonction de cette méthode. Pour le suivi d’un patient, il est important de conserver la même méthode analytique.
Après validation analytique du dosage, le praticien reçoit du laboratoire le résultat (exemple : 3,5 mg/l) et les marges thérapeutiques correspondant à la méthode utilisée (exemple : 0,8-2,0 mg/l). Comme pour d’autres résultats de laboratoires spécialisés, une interprétation clinique se doit d’apporter une valeur ajoutée au praticien. Une telle prestation s’inscrit dans ce qu’on appelle en anglais un active therapeutic monitoring service, entité pluridisciplinaire responsable d’intégrer au profit du médecin traitant et du patient, tant les notions analytiques que pharmacocinétiques et cliniques relatives aux dosages demandés.8,13
D’un point de vue pharmacocinétique, l’adaptation d’une posologie se fonde sur la connaissance des caractéristiques usuelles du médicament dosé (paramètres décrivant l’absorption, la distribution, la liaison protéinique, la clairance hépatique ou rénale, etc.) mais aussi de leur variabilité et des facteurs les influençant. Parmi les plus fréquents de ces facteurs figurent les variables démographiques (âge, sexe, poids, taille), les modifications physiopathologiques (insuffisances rénale ou hépatique, autres comorbidités), les interactions médicamenteuses, la nourriture, les conditions particulières (pédiatrie, grossesse, obésité) et les polymorphismes pharmacogénétiques (dont le rôle est de mieux en mieux apprécié). La mesure de marqueurs d’efficacité ou de toxicité, quand ils sont disponibles (exemple : virémie, respectivement perturbations neuropsychologiques, au début d’un traitement anti-VIH par éfavirenz), est également à intégrer dans l’interprétation des taux.
Le profilage pharmacocinétique et pharmacodynamique des médicaments est reconnu comme un élément essentiel à leur utilisation rationnelle, fournissant une description précise des relations dose-concentration-effet/toxicité.14 La prise en compte de la variabilité interindividuelle affectant ces relations résulte des travaux de Sheiner et coll. dès les années 70.15,16 Cette « approche de population » permet à la fois de caractériser la cinétique du médicament dans la population-cible des patients traités, de quantifier la variabilité cinétique et d’identifier les causes à l’origine de concentrations inhabituelles. De telles études permettent d’intégrer les multiples variables influençant la réponse au traitement et de définir un intervalle thérapeutique de référence prédisant au mieux l’efficacité et l’absence de toxicité médicamenteuse.
La finalité de ces études de population consiste à fonder une stratégie formelle d’adaptation posologique sur la base d’une concentration mesurée chez un patient lors du TDM.15 L’idée est de modifier le schéma posologique pour amener les concentrations dans l’intervalle de référence. Une stratégie « Bayésienne » consiste à ne pas modifier aveuglément la dose en proportion du changement de concentration recherché, mais de pondérer ce changement selon le degré de vraisemblance de la mesure par rapport aux concentrations théoriques attendues (figure 1). Cette adaptation peut se faire de manière semi-quantitative par un simple calcul mental dans les cas les plus simples. Des nomogrammes basés sur des études de population sont proposés par exemple pour l’éfavirenz17 ou la phénytoïne.18 Enfin, divers logiciels de modélisation pharmacocinétique prédisant l’effet d’un schéma posologique sont disponibles, mais leur optimisation pour le TDM et le rendu des résultats en routine demeurent imparfaits. Des développements sont souhaitables afin d’offrir au praticien un rapport intégrant tant le résultat numérique qu’un éventuel graphique illustratif associé à une brève interprétation clinique.8
Bien que la pratique du TDM soit largement répandue dans les pays développés, il y a lieu de se demander si ses bénéfices cliniques justifient véritablement les coûts engendrés. Les firmes pharmaceutiques sont en principe réticentes au TDM, craignant que cette approche ne complique l’utilisation de leur médicament et en augmente le coût.7 Cette vision correspond toutefois mal à la réalité reflétée par diverses études coût-efficacité réalisées ces dernières décennies (critères d’évaluation résumés dans le tableau 5).19 La majorité de ces études se sont toutefois focalisées sur les aminoglycosides pour lesquels le TDM a clairement démontré un rapport coût-efficacité favorable.10 Au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), des surdités sévères étaient observées chez plus de 1% des prématurés avant l’implémentation d’une approche TDM, du fait notamment d’une surexposition aux aminoglycosides.20 Ces surdités, associées à des coûts médicaux et sociaux importants, sont maintenant évitées.
Une revue systématique récente de pharmacoéconomie de l’Association internationale de TDM21 conclut que l’efficacité du TDM est fortement corrélée à la provision d’une interprétation pharmacocinétique qualifiée mais que l’on manque encore d’études sur de nombreuses classes de médicaments actuellement dosés. Les bénéfices encourageants observés en termes de réduction de morbidité et de mortalité imposent de combler ces lacunes et de développer la pratique du TDM de la façon la plus efficiente et cliniquement utile.21
La détermination des concentrations sanguines de médicaments n’est pas la seule ni la meilleure façon de suivre un traitement médicamenteux.3 Le TDM n’a donc pas pour objectif unique de « vérifier l’activité thérapeutique » d’un médicament mais, en facilitant l’adaptation de sa posologie, de contribuer à son efficacité et de prévenir sa toxicité, voire de suspecter une non-compliance. Le TDM peut valablement contribuer à la conduite globale et rationnelle de certains traitements médicamenteux spécifiques.21
Alors que fléchit le nombre de nouveaux médicaments lancés sur le marché, le « pilotage fin » des traitements existants est appelé à connaître d’importants progrès.7 Il nécessite toutefois d’être pratiqué de façon rationnelle dès la discussion de l’indication à un dosage jusqu’à la décision d’adaptation posologique.
> Identifier si le contexte clinique nécessite véritablement un dosage de médicament
> S’assurer que le médicament est mesurable et que les bénéfices du TDM ont été démontrés pour la situation clinique concernée
> Effectuer le prélèvement et l’envoi au laboratoire en respectant scrupuleusement les précautions préanalytiques requises et en relevant les informations cliniques nécessaires
> A la réception d’un résultat de dosage, effectuer une interprétation clinique sur la base de la situation du patient ainsi que de la littérature biomédicale
> S’assurer de disposer de tous les éléments et outils nécessaires à l’adaptation du schéma posologique et s’adresser à un centre spécialisé en cas de besoin
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