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ISO 690 | Nau, J., Les benzodiazépines provoquent-elles des démences ?, Rev Med Suisse, 2012/357 (Vol.8), p. 1938–1939. DOI: 10.53738/REVMED.2012.8.357.1938 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2012/revue-medicale-suisse-357/les-benzodiazepines-provoquent-elles-des-demences |
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MLA | Nau, J. Les benzodiazépines provoquent-elles des démences ?, Rev Med Suisse, Vol. 8, no. 357, 2012, pp. 1938–1939. |
APA | Nau, J. (2012), Les benzodiazépines provoquent-elles des démences ?, Rev Med Suisse, 8, no. 357, 1938–1939. https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.357.1938 |
NLM | Nau, J.Les benzodiazépines provoquent-elles des démences ?. Rev Med Suisse. 2012; 8 (357): 1938–1939. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.357.1938 |
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Les benzodiazépines sont, depuis longtemps déjà, prescrites dans le cadre de symptômes anxieux et de troubles du sommeil. On dénonce, ici ou là, des prescriptions massives, trop systématiques ou fort mal adaptées. Certains vont même parfois jusqu’à postuler que cette consommation est, globalement, une réponse pharmacologique à des situations qui n’ont rien de pathologique – ou plus précisément à des souffrances dont la cause première est sociale et non organique. Et ce constat dressé, rien ni personne ne semble en mesure de corriger la situation. C’est sans doute dans ce contexte qu’il convient de situer le travail mené en France et dont les résultats viennent d’être publiés par le British Medical Journal.1 Un travail dont les conclusions peuvent laisser sur sa faim.
Ce travail a été mené par un groupe de chercheurs de l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Les auteurs se sont intéressés à l’association entre la consommation de benzodiazépines et la survenue d’une démence chez les personnes âgées de plus de 65 ans. Ils ont analysé un échantillon d’une cohorte (la cohorte PAQUID1) réunissant des hommes et des femmes âgés de 78 ans en moyenne, et ce avec un suivi de quinze ans.
On estime, en France, à environ 30% des personnes de plus de 65 ans consommant des benzodiazépines pour traiter les symptômes anxieux et les troubles du sommeil. Outre la France, ce phénomène de consommation de masse chez les personnes âgées est observé dans de nombreux pays comme le Canada, l’Espagne ou l’Australie. Autre donnée, difficilement compréhensible au vu des réglementations sanitaires, cette prescription de benzodiazépines se fait sur de longues périodes (souvent plusieurs années) dépassant largement la durée recommandée du traitement qui est de deux à quatre semaines. Il faut d’autre part tenir compte que les effets des benzodiazépines sur la cognition ont fait l’objet de nombreuses études dont les résultats nourrissent des controverses récurrentes.
C’est pour tenter d’y voir plus clair que le travail qui vient d’être mis en ligne par le BMJ a été mené. Il a réuni des chercheurs des unités «Pharmaco-épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de santé sur les populations», «Epidémiologie et biostatistique» et «Neuroépidémiologie» de l’Inserm travaillant ici en collaboration avec l’Université de Bordeaux. Pour tenter de neutraliser les biais qui pouvaient limiter la portée des études antérieures sur ce thème majeur de santé publique, les chercheurs ont procédé à plusieurs analyses croisées à partir des données de la cohorte PAQUID incluant, entre 1987 et 1989, 3777 personnes.
L’étude principale a porté sur un échantillon de 1063 personnes, âgées de 78 ans en moyenne. Ces personnes ne présentaient aucun symptôme de démence au début du suivi. Elles n’avaient pas consommé de benzodiazépines avant la cinquième année de ce même suivi. Sur ces 1063 personnes, 95 ont consommé des benzodiazépines à partir de la cinquième année. Ce qui a permis aux chercheurs de définir deux populations : les personnes «exposées aux benzodiazépines» et les «non exposées». L’incidence de la démence observée chez les personnes exposées est de 4,8 personnes sur 100 par an, contre 3,2 personnes sur 100 par an pour les autres. Est-ce statistiquement suffisant pour conclure ?
«L’analyse des cas de démence dans cette première population montre que les personnes ayant débuté un traitement lors du suivi après cinq ans, ont un risque accru de développer une démence, résume Tobias Kurth, directeur de recherche à l’Inserm. Mais nous avons souhaité vérifier la robustesse de ce résultat par deux analyses supplémentaires.»
Une deuxième analyse a ainsi consisté à créer cinq cohortes de taille réduite à partir du premier groupe. Les chercheurs ont montré que l’association benzodiazépine-démence est bien «robuste» même si la date du début du traitement varie.
Pour compléter ces résultats, les chercheurs ont enfin réalisé une étude cas-témoins sur 1633 personnes présentant une démence (cas) et 1810 sans symptômes de démence (témoins). Toutes étaient issues de l’effectif initial de la cohorte PAQUID. Chaque cas a été comparé à un ou plusieurs témoins en fonction des différentes dates de début de la consommation des benzodiazépines. Cette dernière analyse confirme la tendance observée dans l’étude principale, et ce quelle que soit la durée d’exposition antérieure (de trois à cinq ans pour les utilisateurs récents à plus de dix ans pour les utilisateurs ayant toujours pris des benzodiazépines pendant le suivi).
Au final, les résultats d’analyses croisées sur cette population montrent que les personnes ayant consommé des benzodiazépines pendant le suivi de l’étude présentent environ 50% plus de risque de développer une démence par rapport à celles qui n’en ont jamais consommé. Mais encore ? C’est ici que les choses se compliquent. Les auteurs expliquent en effet que leur étude «ne permet pas d’affirmer qu’il y ait un lien de cause à effet». Et ils ajoutent que c’est le cas «pour toute étude épidémiologique».
«D’après nos analyses, l’exposition aux benzodiazépines des personnes âgées de plus de 65 ans est associée à un risque accru de démence. Même si nous ne pouvons prouver qu’il existe un lien de cause à effet, nous constatons que les individus consommant des benzodiazépines présentent environ 50% plus de risque de développer une démence durant le suivi, comparés à ceux qui n’en ont jamais consommé» souligne Bernard Bégaud, l’un des signataires de la publication.
Ces chercheurs recommandent encore «d’être plus vigilants» sur l’utilisation de ces molécules qui, toutefois, «restent utiles pour traiter l’insomnie et l’anxiété chez les personnes âgées» même si «leur prise peut entraîner des effets indésirables, tels que des chutes». Avec ces nouvelles données confortant celles de quatre études antérieures, ils recommandent de «limiter les prescriptions à quelques semaines et de contrôler la bonne utilisation de ces molécules». «Nous doutons qu’une durée d’utilisation de l’ordre de quelques semaines puisse avoir un effet délétère sur le risque de démence» conclut Bernard Bégaud. Par ailleurs, des études supplémentaires permettraient également de savoir si on retrouve cette association chez les personnes âgées de moins de 65 ans.
A ce stade, un Candide pourrait faire plusieurs remarques interrogatives. Quel est l’objectif d’une étude épidémiologique de ce type s’il est d’emblée acquis qu’elle ne pourra pas conclure à une relation de cause à effet ? Les données dans ce domaine n’étaient-elles pas suffisamment convergentes pour qu’on ne puisse pas faire l’économie d’une telle étude qui conclut sur le fond à des conseils de bon sens et à la nécessité de respecter les indications en vigueur de prescription des benzodiazépines ? Si de nouvelles études doivent être menées dans ce domaine, pourquoi ne pas user des multiples compétences disponibles dans le secteur de la santé et de la recherche médicale à des fins autrement plus originales ?
Pour avancer, un exemple, qui dépasse la France : tenter de comprendre les raisons profondes qui font que les médecins occidentaux de première ligne prescrivent, massivement et contre les règles, des benzodiazépines chez des personnes âgées qui ne trouvent plus ni le sommeil ni des raisons d’espérer.
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