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ISO 690 Koch, N., Méan, M., Vollenweider, P., Waeber, G., Wasserfallen, J., Partage d’emploi en milieu hospitalier : bilan des expériences au Département de médecine du CHUV, Rev Med Suisse, 2017/584 (Vol.13), p. 2023–2026. DOI: 10.53738/REVMED.2017.13.584.2023 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2017/revue-medicale-suisse-584/partage-d-emploi-en-milieu-hospitalier-bilan-des-experiences-au-departement-de-medecine-du-chuv
MLA Koch, N., et al. Partage d’emploi en milieu hospitalier : bilan des expériences au Département de médecine du CHUV, Rev Med Suisse, Vol. 13, no. 584, 2017, pp. 2023–2026.
APA Koch, N., Méan, M., Vollenweider, P., Waeber, G., Wasserfallen, J. (2017), Partage d’emploi en milieu hospitalier : bilan des expériences au Département de médecine du CHUV, Rev Med Suisse, 13, no. 584, 2023–2026. https://doi.org/10.53738/REVMED.2017.13.584.2023
NLM Koch, N., et al.Partage d’emploi en milieu hospitalier : bilan des expériences au Département de médecine du CHUV. Rev Med Suisse. 2017; 13 (584): 2023–2026.
DOI https://doi.org/10.53738/REVMED.2017.13.584.2023
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médecine interne générale
22 novembre 2017

Partage d’emploi en milieu hospitalier : bilan des expériences au Département de médecine du CHUV

DOI: 10.53738/REVMED.2017.13.584.2023

Job sharing is a promising way of organizing work : it allows physicians wishing to work part-time to access jobs that are usually inaccessible to them, while offering hospitals the possibility to recruit or retain qualified physicians to ensure succession planning. This article describes the advantages and the main challenges of jobsharing in a medical department. It provides concrete guidance to physicians wishing to practice it, to contribute to its dissemination. Jobsharing it is a way of organizing work that is practicable and safe in hospitals, provided that partners have compatible values and vision, respect therapeutic attitudes taken by the partner and optimally coordinate their work.

Résumé

Le partage d’emploi ou jobsharing est un mode d’organisation du travail prometteur : il permet aux médecins souhaitant travailler à temps partiel d’accéder à des postes habituellement inaccessibles, tout en offrant à l’hôpital la possibilité de recruter ou retenir des médecins compétents pour assurer la relève. Cet article décrit les avantages et les défis principaux du partage d’emploi dans un département de médecine. Il donne des pistes concrètes pour les médecins souhaitant travailler ainsi, pour contribuer à sa diffusion. Les expériences montrent que le partage d’emploi est un mode d’organisation du travail praticable et sûr en milieu hospitalier, à condition que les partenaires aient des valeurs et une vision compatibles, respectent les attitudes thérapeutiques prises par le partenaire et se coordonnent de façon optimale.

Introduction

Selon un sondage effectué dans le canton de Vaud, 46 % des jeunes médecins souhaitent travailler à temps partiel (42 % des hommes et 52,5 % des femmes), mais la majorité de ces médecins n’osent pas postuler à un tel emploi par crainte de ne pas être perçus comme suffisamment intéressés par le travail.1 Les hôpitaux, de leur côté, doivent augmenter le nombre de postes à temps partiel et la flexibilité au travail pour faire face aux changements de la démographie médicale.2,3

Différentes barrières à l’augmentation du nombre de postes à temps partiel existent. S’il s’agit de réorganiser le travail en milieu hospitalier aigu pour assurer la continuité des soins malgré la présence discontinue d’une partie des médecins, l’obstacle principal à l’introduction de nouveaux modèles d’organisation du travail est d’ordre culturel.4 Dans la profession médicale en particulier, l’image du médecin idéal reste caractérisée par une disponibilité permanente.5

Dans ce contexte, le partage d’emploi ou jobsharing, mode particulier du temps partiel, se profile comme un mode innovant d’organisation du travail qui présente des avantages à la fois pour l’employeur et l’employé.6 Cet article en décrit les avantages et les défis principaux chez les médecins, sur la base des données de la littérature et des expériences du Département de médecine du CHUV, et donne des pistes concrètes pour le mettre en œuvre dans toute discipline.

Définition du partage d’emploi

Le terme partage d’emploi (jobsharing) se réfère à deux ou plusieurs employés partageant volontairement un poste à plein temps avec des tâches interdépendantes et une responsabilité commune.6 La délimitation entre le temps partiel et le partage d’emploi relève, en pratique, d’un continuum plutôt que d’une délimitation précise, allant de l’indépendance complète des responsabilités jusqu’à leur partage dans tous les domaines.7

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Avantages et défis du partage d’emploi

Les bénéfices du partage d’emploi sont bien documentés pour les entreprises et les organisations en général.8 Pour la profession médicale toutefois, les articles récents et pertinents sont rares. De façon générale, le partage d’emploi permet aux médecins souhaitant travailler à temps partiel d’accéder à des postes qui leur sont habituellement inaccessibles, tout en offrant à l’hôpital la possibilité de recruter ou retenir des talents prometteurs.9,10

Dans les organisations sanitaires, les employés comme leurs responsables hiérarchiques considèrent la conciliation entre vie privée et vie professionnelle comme l’avantage principal de ce mode d’organisation du travail, et la compatibilité entre les partenaires comme une source potentielle de conflits.10,11

Les employés estiment que le partage d’emploi augmente la compétence individuelle par le partage de compétences entre les partenaires et favorise le soutien réciproque au travail comme dans la vie sociale.7,10 Ces aspects positifs s’accompagnent d’une difficulté à apprécier les résultats de son propre travail en raison de la responsabilité partagée.10 Les responsables hiérarchiques et/ou les directions d’hôpitaux citent, parmi les inconvénients, l’augmentation des coûts liés à l’administration (par exemple, entretiens d’appréciation, mise à disposition d’un poste de travail).7,10 De plus, en médecine, le risque de manque de continuité des soins est un sujet de préoccupation important.10

Le partage d’emploi n’est pas fait pour tout le monde. Il requiert des qualités particulières et des valeurs communes : flexibilité, confiance en son partenaire, volonté de partager l’information, travail en mode de coopération plutôt que de concurrence.7 Si ces conditions sont remplies, un effet bénéfique en découle, sur l’apprentissage réciproque et le transfert de compétences.7

Le partage d’emploi au département de médecine du CHUV

Parmi plusieurs mesures destinées à adapter les conditions de travail à la jeune génération de médecins, le CHUV encourage le partage d’emploi, avec le soutien du Service de la santé publique. Pour permettre un temps optimal consacré à la transmission des informations cliniques, la direction du CHUV finance 5 à 10 % de salaire supplémentaire à chacun des partenaires partageant un poste prévu pour un seul médecin à temps plein. Depuis 2012, huit binômes ont bénéficié de cet incitatif financier dans le Département de médecine.

Le bilan de ces expériences est globalement positif. Malgré les craintes initiales liées au risque de perte de continuité dans la prise en charge des patients, les médecins partageant un poste comme leurs responsables soulignent le bénéfice d’avoir deux regards complémentaires au lieu d’un seul. La qualité de la transmission des informations cliniques est primordiale, de même que le partage des autres informations liées à l’organisation du service. Elles doivent permettre au binôme de fonctionner sans demander à l’équipe médico-infirmière ou au patient de répéter son histoire clinique ni de dupliquer le travail à effectuer. La présence conjointe des deux partenaires quelques heures par semaine facilite la transmission d’informations et l’apprentissage réciproque, mais ce n’est pas un prérequis indispensable. Les conditions de réussite sont le respect des attitudes thérapeutiques prises par le partenaire ainsi qu’une coordination optimale et une compatibilité des valeurs au sein du binôme.

Une analyse dans le service de médecine a montré que le travail en partage d’emploi chez les médecins n’a pas d’impact sur la qualité des soins, la durée de séjour ou la satisfaction des collaborateurs.12 Il s’agit donc d’un mode de travail sûr et acceptable. Les tableaux 1 et 2 synthétisent les avantages et les défis du partage d’emploi en milieu hospitalier.

Tableau 1

Avantages du partage d’emploi

Tableau 2

Défis du partage d’emploi

En pratique : quand partager un emploi ?

Le partage d’emploi comporte des enjeux spécifiques aux différentes étapes du parcours professionnel des médecins. Compte tenu des défis mentionnés, il est souhaitable d’avoir acquis une certaine compétence clinique et une connaissance suffisante de l’environnement hospitalier avant de partager un poste. Chez les médecins en formation postgraduée, un tel partage prolonge la durée de la formation dont il s’agit de tenir compte en doublant la période de formation habituelle dans l’unité ou le service. Cette contrainte est bénéfique pour le service, car elle entraîne une stabilité accrue du personnel médical.

La plupart des expériences de partage d’emploi au CHUV ont été conduites par des cheffes de clinique. Une motivation fréquemment évoquée est le souhait de consacrer plus de temps à des activités extraprofessionnelles, ou de mieux associer activité clinique et recherche. Le partage d’emploi s’avère particulièrement enrichissant si les deux médecins ont des expériences cliniques différentes (ancienneté et/ou expériences acquises dans des hôpitaux ou des disciplines différentes). Ceci renforce le regard complémentaire sur les mêmes patients et l’acquisition de nouvelles compétences grâce à l’échange réciproque.

Parmi les cadres, les expériences formalisées se font plus rares. Le partage d’emploi y est pratiqué sans être nommé, ni être particulièrement mis en avant.13 Pour de nombreux domaines de spécialisation en milieu universitaire, le partage d’emploi peut contribuer à maintenir l’expertise dans le service.5 Au niveau de chef(fe) de service (topsharing), il n’est pour l’instant pas pratiqué au CHUV et peu fréquent dans d’autres entreprises. Il s’agit pourtant d’un modèle prometteur : pratiqué de façon intergénérationnelle, le partage d’emploi peut permettre aux médecins seniors de diminuer leur taux d’activité tout en transmettant leur savoir et leur expérience à un médecin plus jeune.13

Bien débuter le partage de poste

Pour le médecin souhaitant partager un poste, il s’agit d’abord de clarifier ses propres motivations, puis de trouver un partenaire et un service qui l’acceptent. Pour l’instant, la recherche de partenaire se fait surtout en interne de bouche à oreille. Elle est facilitée par les responsables de services acquis à l’idée. La postulation conjointe pour un poste à 100 % mis au concours est rare, mais légalement, elle est possible. Il s’agit alors de la préparer soigneusement.6

Une fois l’engagement d’un binôme confirmé, il s’agit de bien définir les règles de fonctionnement au départ, dans le but d’éviter des malentendus, voire des conflits. Plusieurs modalités organisationnelles existent. Les aspects à prendre en compte sont décrits dans le tableau 3.

Tableau 3

Aspects pratiques à clarifier au début du partage d’emploi

Comme pour tout nouveau poste de travail, le partage d’emploi demande un temps d’adaptation. Il est avantageux de ne pas cumuler trop de changements (changement de service ou d’institution, promotion à un niveau hiérarchique supérieur). Il s’agit également de bien informer l’équipe hospitalière (médecins, infirmiers et secrétaires) sur les modalités de communication avec le binôme.

Perspectives

Le partage d’emploi est un modèle porteur d’espoir pour les nouvelles générations de médecins : il favorise la flexibilité au travail, souffre de moins de préjugés négatifs que le temps partiel traditionnel, et permet plus facilement l’accès à des postes à responsabilité.

Pour favoriser sa diffusion, il s’agira, à l’avenir, de résoudre certains aspects concrets comme la création de plateformes permettant aux médecins intéressés de se rencontrer, et la formalisation du processus de recrutement en binôme. Surtout, il faudra convaincre l’ensemble des responsables hiérarchiques que l’adoption de modèles de travail innovants est incontournable pour assurer la relève hospitalière. Pour les médecins cadres très spécialisés, des modèles combinant le partage d’emploi en clinique associé à un temps partiel en recherche, enseignement ou management, se profilent comme des opportunités intéressantes.

Si le CHUV accorde actuellement un financement supplémentaire pour promouvoir le modèle, la question du rapport coût-bénéfice devra être abordée en détail. Le temps supplémentaire des transmissions est facile à chiffrer. Nos expériences au Département de médecine nous font entrevoir d’autres bénéfices potentiels, difficilement mesurables, dont il faudra aussi tenir compte, comme par exemple des prises en charge cliniques améliorées par la complémentarité des intervenants et des médecins plus épanouis dans leur travail et plus productifs lorsqu’ils sont présents.

Conclusion

Le partage d’emploi est un mode d’organisation du travail praticable et sûr en milieu hospitalier, à condition que les partenaires aient des valeurs et une vision compatibles, respectent les attitudes thérapeutiques prises par le partenaire, et se coordonnent de façon optimale.

Il est indéniable que le partage d’emploi rajoute un médecin de plus dans les prises en charge cliniques déjà complexes. Cependant, la question de la coordination des soins dans un milieu hautement spécialisé, caractérisé par des intervenants multiples, n’est pas spécifique au partage d’emploi. On peut même argumenter qu’il favorise la prise de conscience des enjeux liés au travail en équipe et la confiance réciproque entre intervenants. Les compétences requises pour le partage d’emploi sont souhaitables chez tous les médecins exerçant dans le milieu interprofessionnel et interdisciplinaire de nos jours : coopération, générosité, transparence, capacité de remise en question, communication ouverte. Le partage de poste devient ainsi un mode de diffusion de compétences hautement souhaitées permettant de retenir les médecins qui possèdent ces compétences à l’hôpital. Nous lui souhaitons donc un bel avenir – pour le bien des médecins, des hôpitaux et des patients.

Remerciements:

Aux médecins du CHUV qui ont partagé avec nous leurs expériences et réflexions au sujet du partage d’emploi, pour le temps qu’ils y ont consacré et la qualité de leurs réflexions.

Conflit d’intérêts :

Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

Implications pratiques

▪ Les médecins souhaitant pratiquer le partage d’emploi devraient se renseigner sur les avantages et les défis de ce mode d’organisation du travail avant de le pratiquer

▪ Si les deux partenaires du binôme sont compatibles en termes de valeurs et d’objectifs au travail, le partage de poste sera plus facile

▪ Au début du partage d’emploi, il s’agit de bien définir les modalités de collaboration entre les partenaires et leurs responsables pour éviter les malentendus

Auteurs

Nathalie Koch

Adjointe à la Direction médicale du CHUV
Rue du Bugnon 21, 1011 Lausanne
koch.nathalie@chuv.ch

Marie Méan

Service de médecine interne, Centre hospitalier universitaire vaudois
1011 Lausanne
marie.mean@chuv.ch

Peter Vollenweider

Service de médecine interne Département de médecine Centre hospitalier universitaire vaudois
Lausanne

Gérard Waeber

Service de médecine interne BH10-622
CHUV, 1011 Lausanne
monica.cosma@chuv.ch
gerard.waeber@chuv.ch
olivier.lamy@chuv.ch
drahomir.aujesky@chuv.ch

Jean-Blaise Wasserfallen

Direction médicale CHUV 1011 Lausanne

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