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ISO 690 | Castioni, J., Hagenbuch, A., Tâche, J., Cappai, M., Jovanovic, M., Sartori, C., Délégation des tâches médico-administratives : perspectives croisées entre médecins assistants et secrétaires, Rev Med Suisse, 2017/584 (Vol.13), p. 2048–2051. DOI: 10.53738/REVMED.2017.13.584.2048 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2017/revue-medicale-suisse-584/delegation-des-taches-medico-administratives-perspectives-croisees-entre-medecins-assistants-et-secretaires |
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MLA | Castioni, J., et al. Délégation des tâches médico-administratives : perspectives croisées entre médecins assistants et secrétaires, Rev Med Suisse, Vol. 13, no. 584, 2017, pp. 2048–2051. |
APA | Castioni, J., Hagenbuch, A., Tâche, J., Cappai, M., Jovanovic, M., Sartori, C. (2017), Délégation des tâches médico-administratives : perspectives croisées entre médecins assistants et secrétaires, Rev Med Suisse, 13, no. 584, 2048–2051. https://doi.org/10.53738/REVMED.2017.13.584.2048 |
NLM | Castioni, J., et al.Délégation des tâches médico-administratives : perspectives croisées entre médecins assistants et secrétaires. Rev Med Suisse. 2017; 13 (584): 2048–2051. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2017.13.584.2048 |
Exporter la citation | Zotero (.ris) EndNote (.enw) |
The hospital activity of physicians in training mainly consists in direct contacts with patients, tasks indirectly linked to patients such as administration, as well as clinical and theoretical training. In our era of digitalization, an important administrative work load without any added medical value fills their daily chores. In parallel activities of medical secretaries are getting more partitioned, with their desks situated far from physicians’ and tasks often limited to finalizing discharge letters. Added to multiple overtime, this reduces physicians’ and secretaries’ work satisfaction. This article describes the context and development of delegating medico-administrative tasks to secretaries in our department of internal medicine.
L’activité hospitalière des médecins en formation se compose principalement de contacts directs avec les patients, de tâches indirectement liées au patient, essentiellement administratives, et de formations pratique et théorique. A l’heure de la numérisation, une importante activité administrative sans valeur médicale ajoutée remplit encore leur quotidien. Parallèlement, l’activité des secrétaires médicales se cloisonne, avec des bureaux éloignés des médecins et des tâches se limitant souvent à la finalisation de lettres de sortie. Ajoutés au cumul d’heures supplémentaires, ces éléments diminuent la satisfaction des médecins et des secrétaires dans leur travail. Cet article décrit le contexte et la mise en œuvre d’une délégation de tâches médico-administratives à des secrétaires de médecins dans notre service de médecine interne hospitalière.
La plupart d’entre nous avons choisi le métier de médecin avant tout pour soigner et accompagner les patients dans leur parcours de vie, au moyen des compétences médicales acquises pendant notre cursus pré et postgradué.1 Notre métier se compose également d’une charge administrative conséquente. Cette dernière est souvent perçue comme un mal nécessaire à la bonne prise en charge de nos patients. Elle est d’autant plus présente que l’augmentation du flux de l’information médicale et de la multimorbidité rend de plus en plus compliqués la saisie de données, leur traitement et leur interprétation. En 2011, l’informatisation du dossier patient a été un changement majeur dans notre institution, tant pour notre pratique médicale que pour celle des soins et des secrétaires médicales. Toutefois, cette numérisation n’a que partiellement soulagé l’importante activité administrative en lien avec la prise en charge des patients.2 La pression est grande pour que ces systèmes informatiques évoluent et facilitent encore plus notre travail.3 Parallèlement, l’activité des secrétaires médicales se cloisonne, avec des bureaux éloignés des médecins et des tâches se limitant souvent à la finalisation de lettres de sortie. Cela amène les médecins à assumer des tâches sans valeur médicale ajoutée, de façon autonome, et contribue à allonger leurs journées de travail. Au final, l’insatisfaction au travail et le risque de burnout sont augmentés, tant chez les médecins que chez les secrétaires.4
La quantité d’activité administrative effectuée par les médecins assistants (MA) a été mesurée en 2015 dans notre service, en temps réel.5,6 Cette étude observationnelle démontre : 1) un temps administratif facilement identifié (prise de rendez-vous, demande d’examens, ajout de laboratoire) de 32 minutes par jour (5 %) et une partie plus difficilement identifiée (recherche d’informations, tâches administratives non liées au patient, etc.) de 46 minutes par jour (7 %) ; 2) un changement d’activité task-switching intervenant toutes les 4 minutes et agissant comme frein à l’efficience d’accomplir une tâche 7 et 3) une heure et 35 minutes de travail supplémentaire sur une journée contractuelle de 10 heures.
Stimulé par les résultats de cette étude, notre service a décidé de redéfinir et optimiser l’activité médicale et administrative. La collaboration et la communication entre ces deux corps de métiers a été favorisée en créant des postes de secrétaire de médecin au sein même des bureaux des médecins.
Avec l’aide de la direction des ressources humaines, nous avons demandé aux MA et aux secrétaires de classer les tâches effectuées selon leur valeur médicale ajoutée (à ne pas déléguer) ou non ajoutée (à déléguer) (tableau 1). Ce processus a permis de mettre en évidence également des tâches devenues obsolètes et/ou inutiles (à supprimer), car simplifiées par exemple par un nouveau processus.
Notre réflexion n’a pas abordé la question des tâches déléguées à d’autres corps de métiers ((assistantes de médecin (physician assistant), infirmières cliniciennes (clinical nurse) ou d’infirmières praticiennes (nurse practitioner)). Cette délégation-ci, bien établie dans d’autres pays, suscite de l’intérêt également en Suisse.8,9
Ce modèle a pour but d’assurer une utilisation optimale des ressources humaines en respectant au mieux le champ des compétences correspondant à chacun des métiers. Ainsi, il vise une amélioration de l’efficience, une diminution des tâches administratives par les médecins, une diversification des tâches des secrétaires et une augmentation de la satisfaction des équipes. Deux modèles d’organisation (A et B) ont été testés dans une phase préliminaire (tableau 2). Le modèle A demande aux secrétaires d’assurer la délégation des tâches dans une unité de soins type avec par exemple, 24 lits, 3 MA, 1 CDC (chef de clinique) et 2 étudiants, tout en gardant les activités de suivi et de finalisation des lettres de sortie. Le modèle B demande qu’une secrétaire soit affiliée simultanément à deux unités, soit 48 lits, 6 MA, 3 étudiants, 2 CDC, et qu’elle se consacre uniquement aux activités de délégation, excluant le suivi et la finalisation des lettres de sortie.
Le modèle A est très rapidement plébiscité. Les MA ressentent effectivement une charge administrative moindre et ont l’impression d’être plus présents auprès des patients. De son côté, la secrétaire des médecins trouve très facilitant d’être dans une seule unité à la fois. En s’organisant par exemple comme décrit dans le tableau 3, elle participe ainsi à tous les moments interprofessionnels de partage d’informations, y compris le nouveau point de 8 heures. Ce colloque de 30 minutes rassemble les acteurs principaux d’une unité de soins (MA, CDC, médecin cadre, infirmier responsable d’unité, infirmière de liaison) autour de la gestion proactive des séjours des patients (validation du projet thérapeutique, orientation des patients, anticipation des lettres/fax à créer) de la remise de la nuit et de l’organisation quotidienne de l’unité. La création d’un poste de travail au sein même du bureau des MA a permis une collaboration étroite appréciée de tous.
Le modèle B est jugé par contre moins satisfaisant, car il ne permet qu’une faible collaboration interprofessionnelle, avec l’impossibilité de participer simultanément aux points de 8 heures des deux unités. En plus, l’absence de gestion des lettres de l’unité est moins congruente et présente un risque de perte d’intérêt, même si la délégation des tâches peut être assumée. Ce modèle est donc réservé aux périodes de sous-effectif en personnel administratif.
Les contraintes et leurs solutions potentielles, en termes de recrutement, de formation, de budget et d’espace disponible sont décrites dans le tableau 4. Par exemple, au niveau du budget, 1,5 équivalent plein temps (EPT) de médecin ont été transformés en 2 EPT de secrétaires de médecin pour s’adapter au modèle A. Ainsi, dans notre service, ce sont dorénavant 41,5 EPT MA et 12,6 EPT personnel administratif qui sont comptabilisés pour les 200 patients répartis dans 8 unités de soins.
La délégation des tâches nous permet de gagner environ 60 minutes par jour par MA (45ʹ de tâches et 15ʹ de perte de temps liée à l’interruption de tâches). Même si la journée de travail ne semble pas raccourcie, nous apprécions la qualité de cette journée, qui permet de mieux se centrer sur les patients et d’avoir plus de temps à la réflexion de leur problématique. Par ailleurs, la proximité des secrétaires et notamment au point de 8 heures permet d’anticiper et prioriser la création et le suivi des lettres de sortie. La déviation des téléphones auprès des secrétaires de médecin pendant la visite nous permet de ne pas être interrompus et de garder notre attention et celle des soignants sur nos patients. Certaines informations pour la gestion du séjour du patient peuvent être également directement demandées par des tiers à notre secrétaire sans nous déranger.
Les défis seront de nous accompagner dans l’apprentissage de délégation des tâches, car nous avons souvent appris à fonctionner en autonomie. Le risque de sous-employer la délégation est réel et déjà observé, par exemple, dans la difficulté pour certains d’entre nous de dévier leurs téléphones pendant la visite médicale. Une raison en est peut être le manque de confiance dans le binôme, consécutif au changement d’unité chaque trimestre. Un effort tout particulier doit ainsi encadrer les rotations de service.
L’expérience est quasiment unanimement appréciée de notre côté avec une valorisation et une diversification importante de nos activités. En plus de la rédaction et l’envoi des lettres, nous jouons un rôle pour la bonne gestion administrative durant le séjour du patient et de répondant auprès des médecins. Nous suivons l’évolution des patients depuis leur entrée jusqu’à l’archivage du dossier bien après sa sortie, avec dorénavant une vue d’ensemble bien plus utile qu’un fonctionnement segmenté, « à la chaîne », où nous étions toute la journée devant un ordinateur à rédiger des lettres. Le travail conjoint avec les médecins est très gratifiant et leur permet d’être soulagés de certaines tâches comme l’obtention de documents dans les cabinets des médecins installés. Faire bureau commun est primordial, car la communication se fait nettement mieux et rapidement.
Plusieurs défis nous attendent. L’absence d’une collègue pendant une période inférieure à 7 jours prévoit un retour au modèle d’organisation B (sans gestion des lettres). Cela risque de nous rendre moins efficient(e)s et d’augmenter notre insatisfaction. Ceci est d’autant plus vrai qu’un remplacement pour la gestion des lettres n’est pas toujours possible, avec un risque important de retard. D’autre part, les rotations des MA chaque trimestre nécessitent un temps d’adaptation du binôme. Cette période de transition est toutefois un joli challenge, car nous devenons des coachs actifs pour les nouveaux MA, en collaboration étroite avec les CDC.
La mise en place de secrétaires de médecins dans le service de médecine interne est le fruit d’une démarche participative visant à permettre à chaque groupe professionnel de pouvoir se recentrer sur le cœur de son métier. Cette solution traduit ainsi concrètement la vision de l’Unité organisation et amélioration continue, rattachée directement à la Direction des ressources humaines.
Même si ce concept organisationnel tend à se répandre au CHUV, nous refusons de parler de généralisation d’une unité à l’autre. En effet, l’approche collaborative au travers d’un groupe de travail pluridisciplinaire ainsi que l’utilisation d’outil méthodologique tel que le « A3 »10 sont les ingrédients indispensables d’un résultat adapté aux réalités du terrain et des équipes. La chasse aux activités inutiles (héritage des organisations antérieures) puis la réattribution de celles dont la valeur ajoutée incombe au mauvais groupe professionnel sont les objectifs prioritaires proposés au groupe afin que toutes et tous puissent bénéficier d’une amélioration substantielle de leurs conditions de travail.
Le défi majeur se situe dans le recrutement d’un profil de secrétaire alliant de bonnes connaissances médicales avec de précieuses compétences sociales telles que la capacité à s’intégrer et collaborer avec une équipe, une personnalité ouverte et résolument orientée client/patient. Pour autant que les critères énoncés ici soient respectés, ce nouveau métier peut offrir des perspectives stimulantes de reconversion pour certains professionnels de la santé, sans pour autant sous-estimer le métier de secrétaire. A terme, les secrétaires de médecins se positionneront certainement comme gardien(ne) des bonnes pratiques de l’unité et assureront ainsi le passage de témoin au gré des rotations des médecins. Et, qui sait, les plus aptes d’entre eux (elles) seront peut-être appelé(e)s à évoluer pour servir les missions liées au suivi des itinéraires cliniques et à l’amélioration du flux patient dans notre institution !
La pérennisation d’une collaboration étroite médico-administrative par la formation de binôme médecin-secrétaire de médecin est l’enjeu actuel pour la bonne marche du projet. Cette collaboration se base fortement sur une confiance mutuelle, qui doit se gagner à chaque changement dans le binôme. Cette activité de délégation n’est pas innée pour les médecins. Sa réalisation nécessite un accompagnement autant dans les aspects de formation (apprendre à déléguer) que d’évaluation (savoir déléguer). Le recrutement des secrétaires est particulièrement sensible et doit aborder d’autres dimensions que le seul métier de secrétaire médicale. A terme et après évaluation régulière, cette activité de délégation doit permettre une augmentation de la satisfaction au travail de deux corps de métiers. Son efficience doit être encore mesurée pour soutenir ce changement de pratique.
Nous tenons à remercier les secrétaires de médecins Mmes M. Gnoungou, F. Mento, A. Babey et B. Niclosse pour leur contribution à ce projet ainsi que la Dr V. Kraege, cheffe de clinique du House Staff impliquée dans l’organisation du service.
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.
▪ Une organisation hospitalière avec des secrétaires de médecins est notre nouvelle réalité
▪ L’expérience est quasiment unanimement appréciée par les médecins et les secrétaires
▪ Les médecins ont l’impression d’avoir plus de temps à dédier aux soins du patient
▪ Le défi majeur est le recrutement de secrétaires avec un profil spécifique adéquat
▪ L’efficience de ce fonctionnement doit être encore mesurée pour soutenir ce changement de pratique
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