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ISO 690 | Zisimopoulou, S., Guessous, I., Syndrome de l’intestin irritable : un diagnostic d’exclusion?, Rev Med Suisse, 2012/355 (Vol.8), p. 1821–1825. DOI: 10.53738/REVMED.2012.8.355.1821 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2012/revue-medicale-suisse-355/syndrome-de-l-intestin-irritable-un-diagnostic-d-exclusion |
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MLA | Zisimopoulou, S., et al. Syndrome de l’intestin irritable : un diagnostic d’exclusion?, Rev Med Suisse, Vol. 8, no. 355, 2012, pp. 1821–1825. |
APA | Zisimopoulou, S., Guessous, I. (2012), Syndrome de l’intestin irritable : un diagnostic d’exclusion?, Rev Med Suisse, 8, no. 355, 1821–1825. https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.355.1821 |
NLM | Zisimopoulou, S., et al.Syndrome de l’intestin irritable : un diagnostic d’exclusion?. Rev Med Suisse. 2012; 8 (355): 1821–1825. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.355.1821 |
Exporter la citation | Zotero (.ris) EndNote (.enw) |
The irritable bowel syndrome has been considered a diagnosis of exclusion and multiple diagnostic procedures were often performed in order to exclude an organic disorder. Nowadays, studies show that in young patients, who match the clinical criteria of irritable bowel syndrome and show no alarm features, the prevalence of underlying organic disorders is low, or at least not higher than in the general population. Based on these findings, current recommendations suggest that no extra diagnostic tests have to be performed in those patients, apart from the serological tests in search of celiac disease, which are recommended for patients presenting an irritable bowel syndrome with diarrhea or a mixed-type irritable bowel syndrome.
Pendant longtemps, le syndrome de l’intestin irritable (SII) a été considéré comme un diagnostic d’exclusion et de multiples examens diagnostiques étaient pratiqués afin d’exclure une pathologie organique. Aujourd’hui, les études montrent que, chez les jeunes patients qui remplissent des critères cliniques précis et qui ne présentent pas de signes d’alarme, la prévalence d’une affection organique sous-jacente est faible ou du moins pas plus élevée que dans la population générale. En se basant sur ces constatations, les recommandations actuelles ne suggèrent plus d’effectuer systématiquement des examens supplémentaires chez ces patients, sauf les sérologies à la recherche d’une maladie cœliaque, qui sont proposées pour les patients qui présentent un SII avec diarrhées ou mixte.
Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est un trouble gastro-intestinal caractérisé par des douleurs abdominales chroniques et des altérations du transit, en l’absence de substrat organique identifiable. Il s’agit d’une entité clinique dont la prévalence, la répercussion sur la qualité de vie des individus et les coûts de santé générés sont importants. Le SII a traditionnellement été considéré comme un diagnostic d’exclusion et, par conséquent, la réalisation d’investigations exhaustives et coûteuses était recommandée. Pourtant, les revues systématiques sur l’utilité des tests diagnostiques chez les patients suspectés de SII montrent que chez ceux qui : 1) remplissent des critères cliniques précis et 2) ne présentent pas de «symptômes d’alarme» ou d’anamnèse familiale positive de cancer colorectal ou de maladie inflammatoire intestinale, on peut exclure avec suffisamment de certitude une affection organique sans recourir à des examens supplémentaires.1 Le but de cet article est de présenter les situations dans lesquelles le diagnostic de SII peut être raisonnablement posé sur la base de la clinique seule. L’approche thérapeutique du SII n’est pas discutée dans cet article.
La prévalence du SII en Europe et en Amérique du Nord varie de 10 à 15%.2 Il touche plus souvent les femmes que les hommes (ratio 2 :1) et les patients de moins de 45 ans, malgré le fait que sa prévalence augmente à nouveau chez les sujets âgés.2
Le SII a des répercussions considérables sur la qualité de vie des patients, influençant plusieurs aspects du bien-être (fonctionnement social et émotionnel, concentration, sommeil, etc.).3 Le SII est aussi plus souvent associé à la dépression (30% versus 18%), ainsi qu’aux troubles anxieux (16% versus 6%), que dans la population générale.2
Dans le contexte de l’Union européenne, la majorité des consultations pour SII se font en médecine de premier recours (77% versus 43% en gastroentérologie).3 Comparés aux patients sans SII, ceux avec SII consultent leur médecin plus souvent (1,6 consultation/3 mois versus 0,8), consomment plus de médicaments (69% des patients consomment des médicaments pour des symptômes liés au SII) et s’absentent du travail plus souvent (5,5 jours/an versus 3,1).3
Le SII semble faire partie de la réaction continue du tractus intestinal et du système nerveux central (SNC) aux stimuli internes et externes.4 Le système limbique et les structures paralimbiques relient l’intestin au SNC, permettant la transmission des états émotionnels au niveau de l’intestin et l’altération de la perception gastro-intestinale (contracture, ballonnement) au niveau du SNC.2 Les facteurs psychiques, comme la dépression et l’anxiété, peuvent influencer la communication entre le SNC et le système nerveux entérique, et semblent jouer un rôle sur la manifestation du syndrome ainsi que sur la réponse au traitement.5
Les cellules entérochromaffines du système nerveux intestinal libèrent de la sérotonine (5-HT) qui stimule la motilité intestinale, indépendamment des connexions afférentes avec le SNC. Les patients souffrant d’un SII présentent une diminution de l’expression des transporteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine (SERT) avec, comme conséquences, des taux de sérotonine constamment élevés et une dysrégulation de la motilité intestinale.6
Les patients souffrant d’un SII présentent une hypersensibilité viscérale, en d’autres termes une perception accrue des stimuli, probable conséquence d’une amplification des signaux nociceptifs dans le SNC.7
Des études immunohistologiques proposent l’hypothèse d’une réponse immunitaire intestinale accrue avec l’augmentation du taux plasmatique des cytokines pro-inflammatoires chez les personnes présentant un SII,8 hypothèse qui concerne aussi le SII postinfectieux (SII développé au décours d’une gastroentérite bactérienne).
Des études d’analyse microbiologique de selles associent le SII à une altération de la flore intestinale.9,10 De plus, le test de l’hydrogène expiré est plus souvent anormal chez les patients avec SII que chez les patients contrôles, suggérant une distribution intestinale bactérienne anormale.11 Par ailleurs, une majorité des patients avec SII décrivent un lien entre la prise des repas et l’apparition des symptômes, surtout les repas riches en hydrates de carbone,12 sans qu’un lien de causalité n’ait pu être démontré pour l’instant. Enfin, selon une revue récente des études génétiques sur le SII, les membres de la famille d’un patient souffrant de SII ont deux à trois fois plus de risques de présenter un SII que la population générale. Plus de 100 variations génétiques ont été étudiées et certaines associations positives rapportées.13
Les différents mécanismes probables sont illustrés à la figure 1. Toutefois, il est important de rappeler que, malgré les nombreuses observations, aucune théorie claire et uniciste de la physiopathologie du SII n’a été élaborée et sa véritable cause reste inconnue.
La douleur abdominale, dans le cadre du SII, est par définition chronique (d’une durée de plus de trois mois), intermittente (survenant au moins trois jours par mois au cours des trois derniers mois) et sa survenue est associée à une modification de la fréquence ou de la consistance des selles. La douleur peut être décrite comme une sensation de crampe d’intensité et de localisation variables, ou comme un inconfort abdominal, et est souvent soulagée par la défécation ou le passage de gaz. Une exacerbation en lien avec des facteurs émotionnels peut être décrite. Par contre, une douleur nocturne, une inappétence ou une perte pondérale sont inhabituelles et doivent être considérées comme des symptômes d’alarme (tableau 1).14
On distingue trois sous-types cliniques, cette division permettant d’individualiser l’approche diagnostique et la prise en charge médicamenteuse :
le SII avec diarrhée (selles défaites > 25% du temps et selles dures < 25% du temps), qui représente jusqu’à un tiers des cas, est plus fréquent chez les hommes ;
le SII avec constipation (selles dures > 25% du temps et selles molles < 25% du temps), qui représente jusqu’à un tiers des cas, est plus fréquent chez les femmes ;
le SII avec alternance de diarrhée et de constipation (selles dures et molles > 25% du temps), qui représente un tiers à la moitié des cas.
Il est important de souligner que les patients passent souvent d’un sous-groupe à l’autre. La moitié des patients souffrant de SII décrivent aussi la présence de mucus dans les selles. Par contre, les diarrhées de grand volume, les rectorragies et les diarrhées nocturnes sont inhabituelles et doivent être considérées comme des symptômes d’alarme (tableau 1).15
D’autres symptômes gastro-intestinaux et extra-intestinaux du SII sont présentés dans le tableau 1.
Dans le but de standardiser le diagnostic de SII, plusieurs critères cliniques ont été développés, parmi lesquels Manning en 1976, Rome I en 1990, Rome II en 1999 et Rome III en 2006. Les critères de Rome 1999, en combinaison avec l’absence de signes d’alarme, ont une sensibilité de 65%, une spécificité de 100% et une valeur prédictive positive de 100% dans les séries rétrospectives pour le diagnostic du SII. Dans une étude prospective, la valeur prédictive positive était de 98%.16 Selon une revue de la littérature publiée en 2010 sur la validité des différents critères diagnostiques, il n’existe pas de différences conséquentes en termes de sensibilité et de spécificité entre Manning, Rome I, Rome II et Rome III, qui sont tous validés comme critères cliniques du SII.17 Les critères de Rome III sont actuellement proposés comme les critères de référence.
Les plus récentes recommandations de l’évaluation et de la prise en charge du SII, publiées par l’American College of Gastroenterology IBS Task Force en 2009, encouragent les cliniciens de baser leur diagnostic de SII sur : 1) les critères cliniques et 2) l’absence de signes d’alarme.18 Les mêmes principes sont retrouvés dans les recommandations publiées par la World Gastroenterology Organisation en 2009 et la British Society of Gastroenterology en 2007. Ces guides pour la pratique ne recommandent pas, actuellement, d’effectuer des examens supplémentaires en l’absence de signes d’alarme. En effet, les patients qui remplissent les critères cliniques pour le diagnostic de SII et qui n’ont pas de signes d’alarme ne présentent pas plus souvent de maladie organique intestinale que les patients asymptomatiques, et de ce fait les tests diagnostiques désignés à identifier ou exclure ces maladies (formule sanguine complète, chimie, TSH, examens de selles, US abdominal, colonoscopie) ne sont pas indispensables. Autrement dit, lorsqu’ils sont effectués, ces examens ont les mêmes chances de montrer des résultats pathologiques que chez les patients asymptomatiques. Seule exception, la maladie cœliaque, qui semble présenter une prévalence supérieure chez les personnes souffrant de SII par rapport à la population générale. La recherche des anticorps antitransglutaminase est donc recommandée chez les patients présentant un SII avec diarrhée ou mixte.1,19
La recherche des signes d’alarme sert à identifier le sous-groupe des patients présentant une probabilité augmentée de présenter un trouble organique. La perte pondérale involontaire, les rectorragies, les diarrhées volumineuses ou nocturnes et l’histoire familiale de cancer colorectal, de maladie intestinale inflammatoire ou de maladie cœliaque, la découverte lors de l’examen clinique d’une masse abdominale ou de signes d’anémie nécessitent des investigations supplémentaires. Par ailleurs, il est convenu que tout patient de plus de 50 ans effectue une imagerie endoscopique à la recherche d’une néoplasie colique. Chez les patients présentant des signes d’alarme, la nature et la sévérité de ces symptômes détermineront le choix des examens supplémentaires (examens sanguins et de selles, cultures, colonoscopie en cas de suspicion de colite microscopique, inflammatoire ou d’obstruction mécanique, test de l’hydrogène expiré en cas de suspicion de malabsorption).1,19
Dans le cadre des examens supplémentaires, il est pertinent de discuter le rôle de la calprotectine fécale chez un patient avec des symptômes/signes d’alarme compatibles avec une maladie inflammatoire chronique intestinale. Un taux de calprotectine fécale inférieur à 50 μg/g permet d’exclure une inflammation intestinale sans le recours à l’endoscopie, alors que des valeurs supérieures à 300 μg/g sont associées à une inflammation intestinale active (zone grise 50-300 μg/g). Des résultats faux positifs sont associés à la prise d’aspirine/d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ainsi qu’à la cirrhose hépatique.20 L’utilisation de ce marqueur biologique permet de réduire de 67% les coloscopies effectuées (sensibilité de 93%, spécificité de 96%).21
En l’absence de signes d’alarme et si le patient remplit les critères cliniques, le diagnostic de SII peut raisonnablement être posé et un traitement symptomatique initié. Cette approche n’est possible que si le suivi du patient est adéquat et régulier. Ainsi, la réponse au traitement, l’éventuelle apparition de nouveaux symptômes qui évoqueraient l’existence d’une affection organique associée et les attentes du patient seront prises en considération. Si les symptômes persistent malgré une prise en charge optimale, ou si de nouveaux symptômes apparaissent, ou même si le patient s’avère anxieux malgré la prise en charge, le recours à des examens supplémentaires est indiqué (figure 2).1
Les données de la littérature actuellement disponibles suggèrent que, chez les patients qui remplissent les critères cliniques de SII et ne présentent pas de signes d’alarme, le diagnostic de SII peut être posé avec confiance sur la base de la clinique seule. Les recommandations n’étant que des guides pour la pratique clinique, l’approche ci-dessus est à pondérer en fonction des attentes du patient.19
> Chez les patients jeunes (< 50 ans), qui remplissent les critères cliniques et qui ne présentent pas de signes d’alarme, des examens diagnostiques ne sont pas nécessaires pour poser le diagnostic de syndrome de l’intestin irritable (SII)
> La sérologie à la recherche d’une maladie cœliaque est recommandée chez les patients présentant un SII avec diarrhées ou mixte
> Le suivi adéquat du patient permettra d’évaluer une éventuelle modification des symptômes évoquant l’existence d’une affection organique
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