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ISO 690 | Zellweger, J., Cornuz, J., Arrêt du tabac et prise pondérale, Med Hyg, 2003/2452 (Vol.61), p. 1861–1865. DOI: 10.53738/REVMED.2003.61.2452.1861 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2003/revue-medicale-suisse-2452/arret-du-tabac-et-prise-ponderale |
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MLA | Zellweger, J., et al. Arrêt du tabac et prise pondérale, Med Hyg, Vol. 61, no. 2452, 2003, pp. 1861–1865. |
APA | Zellweger, J., Cornuz, J. (2003), Arrêt du tabac et prise pondérale, Med Hyg, 61, no. 2452, 1861–1865. https://doi.org/10.53738/REVMED.2003.61.2452.1861 |
NLM | Zellweger, J., et al.Arrêt du tabac et prise pondérale. Med Hyg. 2003; 61 (2452): 1861–1865. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2003.61.2452.1861 |
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Weight gain after cessation of smoking is frequent and usually not a severe health problem, but it may discourage some smokers (particularly smoking women) from attempting smoking cessation. For some smokers, the prospect of gaining weight is more important than the gain itself. The physician caring for a smoker willing to quit must openly address the problem with the patient. Strict diet is probably counterproductive but dietetary counseling is useful. Nicotine replacement therapy and bupropion postpone or limit the weight gain and should be used whenever indicated. Physical activity must be encourage as far as possible. If the weight gain is excessive, dietetary intervention must be postponed after the complete smoking cessation.
Bien qu’elle ne représente pas une pathologie majeure sur le plan de la santé, la prise pondérale qui suit fréquemment l’arrêt du tabac est un obstacle important, qui peut décourager certains malades (et surtout certaines fumeuses) d’entreprendre une tentative d’arrêt. Chez certains fumeurs et fumeuses, l’idée de la prise pondérale est plus grave que la prise pondérale en soi. Le médecin qui accompagne un fumeur dans sa tentative d’arrêt doit être conscient du problème et en parler ouvertement avec le fumeur prêt à entreprendre une tentative d’arrêt. Les régimes stricts sont probablement contre-indiqués, mais des conseils diététiques sont utiles. Les substituts nicotiniques et le bupropion ralentissent ou limitent la prise pondérale et doivent être prescrits. L’exercice physique doit être encouragé autant que possible.
«Docteur, je veux bien arrêter de fumer mais vous me promettez que je ne prendrai pas de poids !», «Docteur, je ne voudrais pas grossir autant que mon amie quand elle a arrêté de fumer il y a 2 ans !». Combien de fois n’avons-nous pas entendu de tels propos lorsque nous abordons l’arrêt du tabagisme avec nos patients. La désaccoutumance au tabac est difficile, non seulement en raison de la dépendance physique et psychologique induite par la nicotine (irritabilité, manque de concentration, sensation de fatigue, envie irrésistible de fumer, troubles du sommeil, maux de tête, constipation), mais également par la crainte et/ou la survenue de la prise de poids. Si celle-ci est, objectivement, une conséquence sur la santé relativement mineure par rapport aux bénéfices de l’arrêt de la cigarette, ou aux conséquences du maintien de la consommation de tabac, elle est toutefois souvent perçue comme un obstacle majeur à l’arrêt de la cigarette. Cet article propose une revue sur ce thème et les recommandations chez les fumeurs, et surtout les fumeuses, craignant la prise pondérale.
Les mécanismes à l’origine de la prise pondérale lors de l’arrêt du tabagisme ne sont pas complètement élucidés. Plusieurs mécanismes sont impliqués.1,2,3
Le premier réside dans la modification de l’alimentation avec une augmentation des apports caloriques sous forme de glucides, en particulier entre les repas. Cette modification va de pair avec l’amélioration du goût et de l’odorat qui suit l’arrêt du tabagisme, l’ancien fumeur retrouvant le plaisir de manger ! Le deuxième concerne la disparition de l’effet de type «anorexigène» de la nicotine ;4,5 chaque cigarette fumée élève discrètement et momentanément la glycémie, ce qui explique probablement son effet «coupefaim». C’est ainsi que quelques cigarettes font souvent office de petit déjeuner. La cigarette permet aussi de gérer le creux de dix heures, d’attendre plus facilement l’heure du repas, voire parfois de sauter un repas. Le troisième, probablement le plus important, est en rapport avec la modification du métabolisme énergétique, en particulier de la thermogenèse obligatoire, postprandiale ;6,7,8 la consommation de tabac est en effet accompagnée d’une augmentation de la dépense énergétique quotidienne d’environ 10%, secondaire à l’augmentation du métabolisme de base d’environ 200 à 300 calories/jour. Ainsi, à alimentation et activité physique égales, un fumeur a un poids inférieur d’environ 1,5 à 2 kg par rapport à un non-fumeur. Enfin, la modification du taux de leptine, une protéine de 167 acides aminés impliquée dans la régulation du poids, de la dépense énergétique et de la prise alimentaire, pourrait également jouer un rôle dans la prise pondérale.9 Les données au sujet de ce dernier mécanisme sont toutefois non conclusives. Alors que les premières études avaient mis en évidence des taux moyens de leptine inférieurs chez les fumeurs par comparaison aux non-fumeurs, de récentes données suggèrent le contraire.11 Toutes ces études comportent des limites méthodologiques quant à l’ajustement pour d’autres variables «confondantes» dans la relation leptine-consommation/arrêt du tabac, telles que le poids corporel (ou l’évolution de celui-ci), la composition corporelle (importance relative de la masse adipeuse), ou le taux d’insuline. L’évolution du taux de leptine lors de l’arrêt de la consommation de tabac n’a, en outre, fait l’objet que d’études préliminaires.12
Rappelons tout d’abord que l’être humain tend à prendre du poids avec l’âge. Cette prise pondérale, associée à l’âge et à la baisse des activités physiques qui lui est associée, apparaît cependant moins marquée chez les fumeurs,13,14 comme le suggèrent les données de la Lung Health Study, une cohorte prospective de fumeurs et anciens fumeurs, où 6% des fumeurs qui continuent à fumer prennent 10 kg et plus au cours des cinq ans d’observation, contre 33% des fumeurs qui cessent de fumer.15 La prise de poids moyenne un an après l’arrêt du tabagisme se situe, selon les études entre 2 kg14,16 et 5,5 kg.16,17,18 Certaines études montrent toutefois que la prise pondérale n’est pas inéluctable. En effet, un tiers des anciens fumeurs ont un poids identique à celui qu’ils avaient lors de leur tabagisme actif, et environ la moitié prennent moins de 3 kg dans les dix ans qui suivent l’arrêt.16,19 La prise de poids moyenne dix ans après l’arrêt est de 4 à 5 kg.20,21 La prise de poids est en général maximale au cours des deux ans qui suivent l’arrêt et s’atténue souvent par la suite.22 Chez les jumeaux homozygotes fumeurs dont l’un cesse de fumer, la prise de poids moyenne après quatorze ans est de 4,6 kg chez l’ex-fumeur contre 1,4 kg chez le fumeur (avec apparition d’une différence significative). Par contre, chez les jumeaux dont l’un a toujours été non fumeur et l’autre un fumeur qui a cessé de fumer, la prise de poids du non-fumeur est de 2,0 kg et celle de l’ancien fumeur de 3,4 kg, mais leur poids n’est alors plus significativement différent.23 Il existe donc probablement une composante génétique à la prise pondérale et les fumeurs qui cessent de fumer tendent à retrouver leur poids «naturel» à l’arrêt du tabac.
Les facteurs associés à la prise pondérale sont notamment une consommation tabagique préalable élevée, le jeune âge et un poids initial en dessous de la moyenne.19 La prise pondérale à l’arrêt du tabac peut également être liée à des facteurs ethniques.24,25 Ainsi, les femmes américaines d’origine afro-américaine et hispanique tendent à prendre plus de poids que les fumeuses d’origine caucasienne. Chez les jeunes et les adolescentes, celles qui suivent déjà un régime pour contrôler leur poids, alors qu’elles fument, ont non seulement moins tendance à arrêter de fumer mais également un risque plus élevé de prise pondérale à l’arrêt,26 témoignant probablement de troubles préalables du comportement alimentaire. Alors que les fumeurs qui craignent de prendre du poids font moins de tentatives d’arrêt que les autres27 ou échouent plus souvent,28 ceux qui ont un niveau d’évaluation de leur propre efficacité élevé (high self-efficacy) prennent moins de poids que les autres29,30 et ont plus de chance d’arrêter de fumer.
La prise pondérale à l’arrêt du tabac, si elle n’est pas majeure, comme c’est le plus souvent le cas, ne représente pas en soi un danger pour la santé, et le cas échéant celui-ci reste bien inférieur à celui lié à la poursuite du tabagisme.31 A notre connaissance, seul le risque d’hypertension peut être augmenté chez les anciens fumeurs, comme l’a montré l’étude MRFIT. Cependant, celui-ci était de faible amplitude (risque relatif 1,3).32 Près de la moitié des femmes américaines qui envisagent de cesser de fumer refusent pourtant d’accepter l’idée d’une quelconque prise pondérale.33,34 L’effet de la prise de poids sur le risque de rechute du tabagisme a été démontré dans certaines enquêtes (fig. 1).28,34,35 Chez les adolescentes enceintes issues de milieux défavorisés, certaines reconnaissent même fumer pour diminuer volontairement leur poids et celui de l’enfant à la naissance, dans l’idée de faciliter l’accouchement et la perte pondérale après l’accouchement !
La prise pondérale étant moins nocive à la santé que la poursuite du tabagisme, il est surtout important de combattre l’idée que se font les fumeurs du risque de prise pondérale plus que la prise de poids elle-même.36 Chez certaines fumeuses, le fait de repousser la prise pondérale au-delà de la phase initiale de l’arrêt semble être associé à une amélioration des chances d’arrêt à long terme.33,37 Les interventions possibles se groupent en trois catégories.
Un régime avec restriction calorique lors de l’arrêt du tabac, réalisé sans aide pharmacologique de désaccoutumance concomitante (substitut nicotinique), augmente paradoxalement les risques de rechute. Ceci est probablement dû au fait que le régime accentue le craving nicotinique.38 Par contre, une récente étude scandinave montre qu’une intervention diététique, cette fois-ci associée à la prescription de gomme de nicotine, diminue la prise de poids initiale et augmente ainsi les chances d’arrêt à un an chez les femmes qui ont préalablement rechuté en raison d’une prise pondérale lors d’une tentative antérieure. Cette intervention ne modifie cependant pas le poids final.39 En outre, elle est d’une complexité telle qu’il est quasi impossible de la répliquer en pratique clinique!
Chez les fumeurs présentant des troubles du comportement alimentaire, une prise en charge permet d’influencer la prise de poids ultérieure en réduisant leur consommation alimentaire.17
En conclusion, des conseils diététiques et nutritionnels pour une alimentation équilibrée et normo-calorique devraient être prodigués, mais il faut éviter des régimes stricts.
Comme la cigarette, les substituts nicotiniques augmentent temporairement la dépense énergétique de repos (resting energy expenditure).40 La prise de poids à l’arrêt du tabac est inversement associée à la dose de nicotine administrée sous forme de substitut nicotinique.18,41,42 En pratique clinique, il est donc important de prescrire des substituts de nicotine qui atténuent ainsi la prise pondérale en cours de désaccoutumance.43,44 Ils n’ont par contre pas d’effet sur la sensation de faim ni sur l’augmentation de la proportion d’hydrates de carbone ingérés.44 Le bupropion lui aussi réduit la prise pondérale associée à l’arrêt du tabac; prescrit pour une durée de deux mois (durée habituellement recommandée), l’effet n’est cependant que temporaire et n’est plus significatif à un an,45 comme pour les substituts par ailleurs. Par contre, une récente étude46 évaluant un traitement de bupropion sur une durée de 12 mois montre des résultats encourageants avec une différence significative de prise pondérale entre le groupe actif (+3,8 kg) et le groupe placebo (+5,6 kg). Cependant, un traitement d’une telle durée n’est actuellement pas recommandé en désaccoutumance au tabac. La fluoxétine ralentit la prise pondérale initiale à l’arrêt du tabac, mais ne modifie également pas la prise pondérale à long terme.47
Des données «observationnelles» montrent que les fumeurs faisant régulièrement de l’exercice physique arrêtent plus facilement de fumer que les sédentaires. Les mécanismes évoqués sont une meilleure gestion du stress secondaire à l’arrêt du tabac et du sevrage nicotinique, ainsi que la survenue d’une sensation de bien-être et l’atténuation de la prise de poids.14 En outre, les fumeurs qui cessent de fumer ressentent souvent une amélioration de la tolérance à l’effort qui leur permet d’augmenter leurs activités physiques. Un essai clinique randomisé sur le bénéfice de l’activité physique dans le processus de l’arrêt du tabagisme a évalué un programme d’activités sportives de forte intensité.48 L’exercice physique régulier d’intensité élevée diminue en effet de moitié environ la prise pondérale chez la femme14,48 et augmente en même temps les chances d’arrêt à long terme.48 Malheureusement, un tel programme d’exercices physiques intensif demande du temps et ne peut être suivi par tous les fumeurs. D’autres essais cliniques se sont révélés limités sur le plan méthodologique (taille d’échantillon insuffisant, protocole d’intervention mal défini).49
Il reste à déterminer dans quelle mesure un programme d’exercices physiques moins intensif, d’intensité modérée, et moins chronophage, mieux acceptable pour les fumeurs, apporte également un bénéfice en termes de prise pondérale et d’arrêt du tabac.34 Un essai clinique contrôlé et randomisé soutenu par le Fonds national de la recherche scientifique, réalisé actuellement à Lausanne, évalue précisément le bénéfice d’une telle activité physique pour aider les fumeurs à arrêter de fumer. Il s’agit du programme «Allez Hop!» (www.allezhop.ch). Depuis quelques années, les Office fédéraux de la santé (OFSP) et du sport (OFSPO), ainsi que la Fondation «Promotion de la santé», proposent, en effet, un programme de mise en route de l’activité physique destiné essentiellement aux sédentaires ou aux personnes très peu actives. Au cours de séances structurées et effectuées sous la supervision de moniteurs formés, il vise à garantir le goût et le plaisir de la pratique régulière d’une activité physique. Il comporte un mélange de plusieurs activités d’intensité modérée, telles que la marche à un rythme soutenu (walking), puis, après un certain nombre de séances, un jogging léger, ou toute autre activité sportive récréative, dont l’intensité correspond environ à 65% à 70% de la fréquence cardiaque maximale tolérée. Les résultats seront connus dans environ deux ans.
L’attitude face aux fumeurs qui craignent une prise pondérale lors de l’arrêt de la cigarette devrait donc être la suivante (tableau 1) :
Contre-argumenter, le cas échéant, face au patient récalcitrant (tableau 2) et proposer des activités «réalisables» sur le moyen et long terme (tableau 3), comme le programme «Allez Hop!» (www.allezhop.ch).
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