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ISO 690 | Mach, N., Peut-on proposer un test de dépistage du cancer du poumon en 2006?, Rev Med Suisse, 2005/066 (Vol.2), p. 1333–1337. DOI: 10.53738/REVMED.2006.2.66.1333 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2006/revue-medicale-suisse-66/peut-on-proposer-un-test-de-depistage-du-cancer-du-poumon-en-2006 |
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MLA | Mach, N. Peut-on proposer un test de dépistage du cancer du poumon en 2006?, Rev Med Suisse, Vol. 2, no. 066, 2005, pp. 1333–1337. |
APA | Mach, N. (2005), Peut-on proposer un test de dépistage du cancer du poumon en 2006?, Rev Med Suisse, 2, no. 066, 1333–1337. https://doi.org/10.53738/REVMED.2006.2.66.1333 |
NLM | Mach, N.Peut-on proposer un test de dépistage du cancer du poumon en 2006?. Rev Med Suisse. 2005; 2 (066): 1333–1337. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2006.2.66.1333 |
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Lung cancer is by far the most common cause of death from any tumor. This is partly due to the late stage of most bronchial carcinoma at the time of diagnosis. Curative treatment by surgery is possible only for localized disease. Hope to decrease mortality by screening techniques such as radiography and/or sputum cytology led to several large trials in the eighties. None of these studies were able to show a meaningful decrease in mortality. Improvement in medical imaging lead to a new hope that low-dose CT scan may be an efficient screening tool for lung cancer. This article reviews the data currently available. So far no screening technique has been able to demonstrate an impact on lung cancer mortality despite the higher sensitivity to detect smaller lung tumors. Therefore, in 2006, screening for lung cancer can not be recommended.
Le cancer du poumon est responsable de plus du quart des décès attribués au cancer. Ce dramatique constat est en partie dû au stade avancé au moment du diagnostic dans la très grande majorité des cas. Les grands espoirs d’un rôle prépondérant du dépistage par radiographie du thorax et cytologie des expectorations ont été déçus par les résultats négatifs de grandes études publiées dans les années 80. Les progrès de l’imagerie médicale ont à nouveau suscité un engouement pour le CT-scan comme outil de dépistage. Cet article revoit les études publiées et précise les avantages et les risques potentiels liés au dépistage par cette technique. A ce jour, aucun dépistage aussi sophistiqué soit-il n’a permis de diminuer la mortalité due au cancer bronchique et pour l’instant le CT-scan ne doit pas être recommandé dans cette indication.
Le dépistage a été reconnu comme moyen efficace pour diminuer la morbidité et la mortalité de certains cancers tels que le cancer du col de l’utérus ou le cancer du côlon dans la population générale ou dans certains groupes à hauts risques de développer une tumeur (cf autres articles dans ce numéro de la Revue Médicale Suisse).
Le cancer du poumon représente environ 12% des cas de tumeurs malignes de l’adulte mais est responsable à lui seul de près de 30% des décès dûs aux cancers chez l’homme et plus de 25% chez la femme.1 La mortalité liée au cancer du poumon est très élevée et représente de loin la première cause de décès par cancer. Chez l’homme, elle est supérieure à la somme des décès attribués aux quatre types de cancers suivants en terme de mortalité (prostate, côlon, pancréas et leucémies).
Le taux de mortalité très élevé s’explique par un diagnostic effectué, dans la grande majorité des cas, à un stade localement avancé ou métastatique (stade III ou IV), situations dans lesquelles les traitements sont le plus souvent incapables d’entraîner une rémission durable avec moins de 5% des patients en vie à cinq ans.2
Dans la très grande majorité des cas (>80%) le cancer bronchique est un cancer pulmonaire non à petites cellules, (non-small cell lung carcinoma ou NSCLC). Ces tumeurs se développent le plus souvent chez des fumeurs ou ex-fumeurs au-delà de l’âge de 50 ans. Un traitement curatif chirurgical peut être envisagé uniquement lorsque la tumeur est diagnostiquée à un stade précoce (stade I-II, sans atteinte ganglionnaire médiastinale). Dans ces cas la survie à cinq ans est de près de 70% pour les stades I et d’environ 60% pour les stades II.
Afin de diminuer la mortalité et la morbidité du cancer bronchique de grands espoirs résident dans le dépistage du cancer du poumon. La mise en évidence d’une tumeur pulmonaire à un stade précoce devrait permettre d’effectuer un traitement chirurgical à visée curative. Cet article fait le point sur les différentes mesures de dépistage évaluées et leur utilité dans la pratique quotidienne.
De façon similaire aux méthodes de dépistage évaluées dans d’autres types de cancer, l’examen de dépistage pour une tumeur du poumon doit satisfaire à plusieurs critères importants:
Le test doit permettre de détecter un cancer bronchique à un stade préclinique.
Il faut disposer de modalité thérapeutique efficace pour une pathologie à un stade précoce. Comme mentionné préalablement le traitement chirurgical d’une tumeur bronchique localisée est le seul traitement curatif pour les NSCLC. Néanmoins les résultats de survie démontrent clairement que malgré une chirurgie effectuée à un stade précoce une proportion non négligeable des patients vont développer une récidive locale ou des métastases à distance. Plusieurs publications récentes ont démontré la possibilité d’améliorer la survie des patients opérés pour un NSCLC de stade II en effectuant une chimiothérapie adjuvante, postopératoire.
Il est nécessaire que les mesures de dépistage proposées diminuent objectivement la mortalité des sujets dépistés.
Les tests diagnostiques ne doivent pas être dangereux ou nocifs.
Il faut que l’on considère les résultats du dépistage comme ayant un rapport coût/bénéfice positif pour la population ciblée.
La démonstration d’une diminution de la mortalité spécifique à la tumeur recherchée est essentielle. En effet plusieurs raisons peuvent expliquer des améliorations «artificielles» sur la survie telles que:
Le diagnostic précoce d’une lésion, sans traitement efficace, entraînant un allongement «artificiel» de la durée de vie entre le diagnostic et le décès (lead-time bias).
La détection préférentielle de tumeur lentement évolutive lors du dépistage entraînant une amélioration artificielle de la survie moyenne (lenght-time bias).3
En raison de la relation clairement démontrée entre tabagisme et risque de développement d’un cancer du poumon, la population ciblée pour le dépistage précoce du cancer du poumon est le plus souvent constituée de fumeurs ou d’ex-fumeurs âgés de 50 ans ou plus.
Les tests diagnostiques qui ont fait l’objet d’études à grande échelle sont la radiographie du thorax annuelle, l’examen répété de la cytologie des expectorations et le CT-scan.
En présence d’un groupe à risque identifiable, d’un test diagnostique simple et de la possibilité de réaliser un traitement curatif en cas de tumeur localisée, d’importants espoirs reposaient sur de grandes études évaluant l’impact de ce dépistage sur la mortalité.
Au moins quatre grandes études s’intéressant à la radiographie du thorax et/ou à la cytologie des expectorations comme dépistage du cancer du poumon ont un suivi prolongé de plusieurs années et permettent d’examiner l’impact sur la mortalité. Elles ont été réalisées vers la fin des années 70 et publiées il y a près de vingt ans.4-8 Plus de 35 000 fumeurs âgés de plus de 45 ans ont participé à ces études. Malgré certaines différences de conceptions entre ces quatre études, aucune d’entre elles n’a permis de démontrer une diminution de la mortalité due au cancer du poumon dans les groupes soumis à un dépistage par radiographie du thorax, avec ou sans examen additionnel de la cytologie des expectorations par rapport aux groupes contrôles. Sur la base de ces études, un dépistage systématique des patients fumeurs par un cliché thoracique annuel et/ou l’analyse pathologique des expectorations n’est pas validé et ne peut pas être recommandé.
L’échec de ces mesures de dépistage simples et pragmatiques est explicable par:
Le faible rendement de la radiographie du thorax en terme de sensibilité et spécificité pour la mise en évidence de néoplasie pulmonaire à un stade précoce.
La très basse sensibilité des tests de cytologie des expectorations.
La détection de lésions tumorales à un stade avancé, malgré le dépistage, témoignant des propriétés biologiques intrinsèques des carcinomes bronchiques qui ont souvent une croissance extrêmement rapide.
Les améliorations technologiques spectaculaires dans le domaine de l’imagerie médicale ces quinze dernières années ont permis d’envisager l’utilisation du CT-scan comme nouvel outil de dépistage du cancer du poumon. La possibilité d’obtenir une imagerie à haute définition du parenchyme pulmonaire en moins de vingt secondes, sans artefact de respiration, sans produit de contraste, avec une faible dose d’irradiation a suscité beaucoup d’engouement pour utiliser ce mode radiologique (low-dose CT scanning) dans le dépistage du carcinome bronchique. De nombreuses études de dépistage par low-dose CT scanning ont été mises sur pied enrôlant des milliers de fumeurs asymptomatiques, la grande majorité de ces essais ont été menés au Japon. L’analyse détaillée de ces études est importante pour se forger une opinion sur l’utilité de cette technique de dépistage.
Les six principales études regroupent plus de 13 000 patients dont près de 10 000 au Japon. Aucune des études publiées à ce jour ne compare de façon randomisée le dépistage par CT avec une prise en charge habituelle. Elles ne permettent donc pas d’analyser l’impact sur la mortalité de façon objective, par ailleurs la période de surveillance après les mesures de dépistage est le plus souvent courte. Néanmoins plusieurs éléments importants doivent être relevés. Les trois grandes études japonaises publiées sont des études de cohortes prospectives9,10 et une étude castémoins.11
Sur l’ensemble des trois études nippones, le premier CT de dépistage a mis en évidence des lésions suspectes (nodules pulmonaires non calcifiés) chez environ 11% des sujets. Parmi ces centaines de sujets, un cancer du poumon a été diagnostiqué chez 72 patients. Dans 89% des cas ces cancers du poumon étaient de stade I. Les CT annuels de dépistage ont permis de mettre en évidence soixante cancers additionnels dont 75% de stade I. Dans l’étude de Sone et coll.11 on a pu constater que la radiographie du thorax n’identifiait pas 79% des cancers du poumon de moins de 2 cm et que uniquement 25% des cancers diagnostiqués par CT étaient visibles sur la radiographie thoracique.
Une étude européenne sur 817 fumeurs (> 20 UPA) âgés de plus de 40 ans a mis en évidence 858 lésions pulmonaires non calcifiées chez 350 sujets (43% du collectif).12 Moins de 10% des lésions mesuraient plus de 10 mm et une néoplasie a été diagnostiquée chez onze sujets. Plus de 90% des tumeurs étaient opérables et plus de 50% de stade I. Après un follow-up de plus de deux ans, cinq des onze patients ont présenté une récidive dont quatre en sont décédés.
Une étude américaine13,14 sur 1000 fumeurs de plus de 60 ans démontre la détection de nodules non calcifiés chez 23% des patients avec le CT contre 7% pour la radiographie du thorax. Le CT-scan a permis de mettre en évidence plus de tumeurs de stade I que la radiographie standard (85% vs 60%).
Une seconde étude américaine15 a évalué le rôle du CT-scan annuel et des cytologies des expectorations chez 1520 fumeurs ou ex-fumeurs asymptomatiques âgés de plus de 50 ans. A douze mois, plus de 2000 nodules non calcifiés étaient retrouvés chez 1000 sujets, 25 des 2000 nodules identifiés correspondaient à des cancers.
L’analyse à cinq ans16 met en évidence la détection de plus de 3300 nodules chez près de trois quarts des sujets. Seulement 68 de ces lésions se sont révélées être de nature néoplasique.
Une étude randomisée de grande envergure a débuté en 2002 aux Etats-Unis. En trois ans elle a randomisé plus de 50000 fumeurs ou ex-fumeurs dans deux bras comparant un CT-scan ou une radiographie du thorax annuelle pendant trois ans. Une étude similaire avec près de 20 000 patients est en cours en Europe. Les résultats de ces deux études ne seront sans doute pas disponibles avant 2010.
Malgré les résultats encourageants des études non randomisées publiées, décrivant un taux très élevé de tumeur de stade très précoce, il ne faut pas sous-estimer d’autres paramètres qui doivent être pris en compte pour la validation de ces examens.
L’amélioration des techniques radiologiques permet de mettre en évidence de plus en plus de lésions de petite taille dont la nature reste indéterminée.
La mise en évidence de nodule non calcifié lors d’un CT de dépistage ne pose pas formellement le diagnostic de cancer bronchique et des investigations supplémentaires sont nécessaires. Plus de 95% des lésions détectées par le dépistage se révéleront de nature bénigne après des examens complémentaires parfois compliqués et/ou invasifs (ponction transthoracique, thoracoscopie, etc.).17
Le risque lié à l’irradiation lors de CT-scan annuel dans une campagne de dépistage s’adressant à des sujets sains est également un sujet de controverses. Il est estimé que ce risque n’est pas négligeable et que la réalisation d’un CT-scan thoracique sans produit de contraste annuel dans le cadre d’un programme de dépistage chez un fumeur devait démontrer un gain de mortalité de plus de 5% pour compenser le risque lié aux doses cumulées d’irradiation.18
Les complications psychologiques engendrées par la mise en évidence d’anomalies radiologiques suspectes chez près de 10% des sujets fumeurs devront également être prises en compte.
Finalement des études de coût-efficacité devront également être réalisées mais celles-ci seront nécessaires uniquement si les études randomisées actuellement en cours démontrent un rôle bénéfique du dépistage par CT-scan avec une diminution objective de la mortalité en relation avec le cancer bronchique.
Les nouvelles technologies radiologiques telles que le PET et le PET/CT, dont l’utilité pour évaluer le stade d’extension des tumeurs bronchiques NSCLC est reconnue, n’ont pas encore fait l’objet d’étude dans le domaine du dépistage. La faible sensibilité des examens PET pour des lésions de moins de 10 mm reste un élément qui devrait limiter la surenchère technologique dans les examens de dépistage.
La nécessité urgente d’améliorer la prise en charge des patients souffrant d’un cancer du poumon a suscité un engouement bien compréhensible envers des campagnes de dépistage afin de pouvoir offrir un traitement plus efficace dans une situation tumorale moins avancée.
Malheureusement les données objectives dont nous disposons actuellement ne nous permettent pas encore de participer à l’enthousiasme. Les méthodes de dépistage basées sur la radiographie du thorax et des cytologies des expectorations doivent être abandonnées et pour l’instant aucune étude n’a démontré que l’utilisation d’outils diagnostiques plus performants tels que le CT-scan permettait de modifier la mortalité, but ultime du dépistage. Les résultats très attendus des études randomisées européennes et américaines devraient permettre de répondre définitivement à cette question et recommander peut-être de nouvelles mesures de surveillance par le médecin généraliste pour les patients à risque de développer un cancer du poumon. D’ici là, aucune mesure de dépistage ne peut être formellement recommandée, par contre on ne saurait insister suffisamment sur le rôle primordial du médecin traitant dans la prévention contre le tabagisme, seul moyen qui permettra de diminuer l’incidence du cancer du poumon.
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