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ISO 690 | Etter, J., Cornuz, J., Les mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes sont-elles utiles ?, Rev Med Suisse, 2009/210 (Vol.5), p. 1476–1479. DOI: 10.53738/REVMED.2009.5.210.1476 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2009/revue-medicale-suisse-210/les-mises-en-garde-illustrees-sur-les-paquets-de-cigarettes-sont-elles-utiles |
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MLA | Etter, J., et al. Les mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes sont-elles utiles ?, Rev Med Suisse, Vol. 5, no. 210, 2009, pp. 1476–1479. |
APA | Etter, J., Cornuz, J. (2009), Les mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes sont-elles utiles ?, Rev Med Suisse, 5, no. 210, 1476–1479. https://doi.org/10.53738/REVMED.2009.5.210.1476 |
NLM | Etter, J., et al.Les mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes sont-elles utiles ?. Rev Med Suisse. 2009; 5 (210): 1476–1479. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2009.5.210.1476 |
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Based on the WHO Framework Convention on Tobacco Control recommendations, health warnings and messages should be printed on cigarettes packages. Scientific data show that such messages are effective by delivering important information directly to smokers, who believe these messages more and remember better than they do public education campaigns. These warnings also increase the chance of quitting. This narrative review summarizes the data at the time Switzerland requires such pictures on tobacco products.
L’Organisation mondiale de la santé a adopté la Convention-cadre pour la lutte antitabac. Celle-ci recommande notamment des mises en garde sur les emballages de tabac. La littérature scientifique permet de conclure à l’efficacité sur le changement de comportement des messages sanitaires, en particulier ceux suscitant la peur. De plus, cette stratégie de prévention est bon marché et ce sont finalement les industriels de la cigarette qui paient le coût d’impression. Cet article fait le point à la veille de l’entrée en vigueur de ces mises en garde en Suisse.
En réaction à l’énorme fardeau sanitaire causé par le tabagisme, l’Organisation mondiale de la santé a adopté en 2003 un traité international : la Convention-cadre pour la lutte antitabac (www.who.int/fctc). Les Etats ayant ratifié cette Convention s’engagent à introduire plusieurs mesures dans leur législation nationale, dont certaines concernent l’étiquetage des paquets de cigarettes. La Convention-cadre (art. 11) recommande notamment que des mises en garde claires et lisibles couvrent 30 à 50% des faces principales des emballages de tabac (figures 1 et 2). Ces mises en garde peuvent se présenter sous forme graphique.
La Suisse a signé mais n’a pas encore ratifié la Convention-cadre de l’OMS. La législation suisse prévoit néanmoins l’introduction prochaine (dès janvier 2010) de mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes, en plus des textes de mise en garde, déjà introduits depuis 1978 en petits caractères, et depuis 2004 sur 35% de la face principale des paquets (Ordonnances fédérales du 27 octobre 2004 et du 10 décembre 2007, RS 817.06 et RS 817.064). Ces mises en garde illustrées, compatibles avec celles proposées par l’Union européenne, représentent des photos de maladies et d’autres conséquences du tabagisme, elles sont accompagnées du numéro de téléphone de la ligne « stop-tabac », où les fumeurs peuvent obtenir de l’aide pour arrêter de fumer.
En Hollande, les appels à la ligne d’aide à l’arrêt du tabac ont explosé quand son numéro est apparu sur les paquets de cigarettes.1 Comme ces mises en garde peuvent provoquer un effet d’usure, il est important de varier les messages. Dans cette perspective, l’Ordonnance fédérale prévoit 41 mises en garde illustrées différentes, en trois séries se déroulant sur deux ans chacune. L’utilisation de messages de prévention suscitant la peur ou le dégoût est-elle fondée scientifiquement ? Voici quelques éléments de réponse à cette question.
Une récente méta-analyse de la littérature scientifique sur les messages sanitaires suscitant la peur conclut à leur efficacité. En particulier, elle conclut que la combinaison la plus efficace associe des messages forts suscitant la peur à des messages sur l’efficacité du changement de comportement.2 Les mises en garde illustrées, qui entreront en vigueur en 2010 en Suisse, tiennent compte de ces conclusions puisqu’elles accompagnent des messages forts sur les risques par un numéro de téléphone où les fumeurs peuvent obtenir aide et conseils sur les méthodes efficaces pour arrêter de fumer. Elles reposent donc sur une base théorique et scientifique solide.
L’introduction de ces mises en garde illustrées a été retardée dans plusieurs pays, dont la Suisse, notamment par crainte de conséquences négatives, en particulier la baisse des ventes de cigarettes !3 Ces mises en garde illustrées ont été critiquées notamment parce qu’elles pourraient susciter inutilement de l’anxiété, parce que les fumeurs allaient simplement les ignorer ou les éviter, parce que les illustrations allaient décrédibiliser les messages, voire même que les fumeurs allaient, en réaction, augmenter leur consommation de tabac.4 Ces critiques sont-elles fondées ? Des mises en garde illustrées ont été introduites dans d’autres pays il y a plusieurs années déjà, et on dispose maintenant de suffisamment de recul pour évaluer leur impact.
Ces mises en garde ont pour but de modifier les comportements, notamment en augmentant la perception des risques liés au tabagisme. Le tabagisme tue environ 8000 personnes en Suisse chaque année, les autorités ont donc une forte obligation morale d’informer les fumeurs sur les risques du tabagisme. Avoir conscience des risques n’est bien sûr pas suffisant pour arrêter de fumer, mais cela a néanmoins une forte influence sur le comportement tabagique.5 En effet, le risque pour la santé est la raison la plus souvent invoquée par les fumeurs pour arrêter de fumer.6 On croit souvent que les fumeurs sont suffisamment informés sur les risques du tabagisme, mais en réalité, ils sous-estiment ces risques ou pensent ne pas être concernés personnellement.7 Il s’agit d’une illustration de ce que les économistes appellent le biais d’optimisme. De plus, les fumeurs sont particulièrement peu informés sur les ingrédients et additifs chimiques qui représentent pourtant 15% du contenu des cigarettes.8 La plupart des emballages d’aliments portent plus d’informations sur leur contenu que les paquets de cigarettes, ce qui est tout même surprenant compte tenu de la dangerosité respective de ces deux types de produits largement répandus dans notre société !
Informer sur les risques du tabac doit donc être un objectif prioritaire de santé publique. Un des principes directeurs de la Convention-cadre de l’OMS précise du reste que : « Chacun doit être informé des conséquences pour la santé, du caractère dépendogène et du risque mortel de la consommation de tabac » (art. 4).
Il existe d’importantes variations d’un pays à l’autre quant à ces mises en garde, allant de grandes mises en garde illustrées au Canada à des avertissements plus banals et plus petits aux Etats-Unis. Sans surprise, des études comparatives ont montré que les mises en garde canadiennes étaient mieux retenues par les fumeurs et avaient plus d’impact que les mises en garde américaines.9 Au Royaume-Uni, l’augmentation de 6% à 30% de la surface avant du paquet de cigarettes occupée par les mises en garde a eu un fort impact sur les fumeurs, en particulier au niveau de leur perception des risques, de leur motivation à arrêter de fumer, et du pourcentage de fumeurs déclarant renoncer parfois à une cigarette.9
La littérature scientifique médicale suggère que les mises en gardes illustrées sont efficaces pour augmenter la perception des risques. Par exemple, au Canada, où ces mises en garde parlent du risque d’impuissance, les fumeurs sont plus nombreux à connaître ce risque que les fumeurs d’autres pays où ce thème n’est pas abordé dans les mises en garde.10 Au Canada, les mises en garde sur les paquets de cigarettes sont ainsi devenues l’une des principales sources d’information des fumeurs sur les risques du tabac, juste après la télévision.11
Les illustrations choisies pour les mises en garde suisses évoquent sans détour et assez crûment les conséquences du tabagisme, avec le but manifeste de susciter la peur ou le dégoût. Des enquêtes sur les mises en garde illustrées canadiennes, elles aussi assez choquantes, montrent que ce but est atteint, et que les émotions de peur et de dégoût étaient associées à une plus grande efficacité des messages.12 C’est-à-dire que ceux qui avaient ressenti le plus de peur étaient les plus nombreux à avoir arrêté de fumer après trois mois.12 En choisissant des images suscitant la peur, l’autorité fédérale a donc jugé que la fin justifiait les moyens, et qu’il valait la peine de générer de l’anxiété chez les fumeurs si cela les conduisait à arrêter de fumer.
En réaction à la peur et au dégoût suscités par les avertissements canadiens, seule une petite minorité de fumeurs a adopté un comportement d’évitement, soit en choisissant de n’acheter que les paquets illustrés par les messages les moins agressifs, soit en cachant les avertissements en insérant, par exemple, le paquet dans un étui.12 Toutefois, les fumeurs qui avaient ainsi évité ces messages n’étaient pas moins nombreux à avoir arrêté de fumer trois mois plus tard.12
Dans des enquêtes d’opinion au Canada, il a été demandé aux fumeurs si ces avertissements illustrés avaient un impact sur leur consommation de tabac. Les fumeurs ont déclaré que les avertissements canadiens (qui représentent 50% de la surface d’un paquet) les ont conduits à fumer moins12 ou à arrêter de fumer.13 Dans une enquête aux Pays-Bas, les fumeurs ont aussi rapporté que les avertissements prescrits par l’Union européenne (texte sur 30% de la surface du paquet) les motivaient à arrêter de fumer.14 En Australie, des mises en garde illustrées ont eu aussi un impact positif sur l’intention d’arrêter de fumer chez des adolescents.15
Le but de ces mises en garde est bien entendu, en premier lieu, de diminuer le nombre de fumeurs. Cet objectif semble être atteint. En effet, une étude longitudinale au Canada a montré que le fait de connaître ces messages, de les avoir lus et discutés augmente les chances d’arrêter de fumer dans les trois mois.16 Il est vrai cependant que pour l’instant, il existe peu d’autres études longitudinales sur l’impact de ces mises en garde illustrées sur l’arrêt du tabac. A l’inverse, il n’existe à notre connaissance aucune preuve qu’en réaction à ces avertissements certains fumeurs augmenteraient leur consommation de tabac. Si ces avertissements n’étaient pas efficaces, l’industrie du tabac n’aurait sans doute pas agi aussi activement pour empêcher l’introduction de cette mesure.3 Au vu du faible nombre d’études sur l’impact de cette mesure sur la consommation de tabac, il serait important d’évaluer cet impact en Suisse. Le Monitoring tabac, mandaté par l’Office fédéral de la santé publique, documentera en partie cet impact17 mais des études plus approfondies seraient nécessaires.
En utilisant les paquets de cigarettes comme support, les messages sont communiqués de manière répétitive au moment même de fumer, à tous les fumeurs (tableau 1). Ainsi, tous les fumeurs de vingt cigarettes par jour y sont exposés plus de 7000 fois par an. De plus, les mises en garde illustrées sont particulièrement adaptées pour informer les personnes les moins éduquées, qui sont moins facilement atteintes par les autres sources d’information, sur les risques du tabagisme. Enfin, cette mesure ne coûte rien au contribuable, elle est donc l’une des mesures les plus efficientes (rapport coût-efficacité très attractif) pour diminuer la morbidité et la mortalité causées par le tabac.
En conclusion, à la question « Les mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes sont-elles utiles ? », la réponse est actuellement oui !
> Au patient fumeur qui interrogerait son médecin au sujet de l’efficacité des images « chocs » sur les paquets de cigarettes, il est possible de lui signaler qu’une étude canadienne a montré que le fait de connaître ces messages, de les avoir lus et discutés augmente les chances d’arrêter de fumer trois mois plus tard
> On peut également lui dire que, à l’inverse, il n’existe aucune donnée suggérant que certains fumeurs augmenteraient leur consommation de tabac
> De plus, si ces avertissements n’étaient pas efficaces, l’industrie du tabac n’aurait sans doute pas essayé d’empêcher l’introduction de cette mesure !
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