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ISO 690 | Arcens, M., Stirnemann, J., Mayor, G., John, G., Epidémiologie et stratégies de prévention des complications liées au sondage urinaire, Rev Med Suisse, 2018/616 (Vol.14), p. 1518–1521. DOI: 10.53738/REVMED.2018.14.616.1518 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2018/revue-medicale-suisse-616/epidemiologie-et-strategies-de-prevention-des-complications-liees-au-sondage-urinaire |
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MLA | Arcens, M., et al. Epidémiologie et stratégies de prévention des complications liées au sondage urinaire, Rev Med Suisse, Vol. 14, no. 616, 2018, pp. 1518–1521. |
APA | Arcens, M., Stirnemann, J., Mayor, G., John, G. (2018), Epidémiologie et stratégies de prévention des complications liées au sondage urinaire, Rev Med Suisse, 14, no. 616, 1518–1521. https://doi.org/10.53738/REVMED.2018.14.616.1518 |
NLM | Arcens, M., et al.Epidémiologie et stratégies de prévention des complications liées au sondage urinaire. Rev Med Suisse. 2018; 14 (616): 1518–1521. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2018.14.616.1518 |
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Indwelling urinary catheter (IUC) is encountered in every four admitted in-patients. The risk of bacteriuria increases by 3‑7 % every day and is almost universal at 30 days. Of these, 10 % will develop symptomatic infection, bacteremia, septic choc or death. Traumatic complications of IUC are seldom studied, but are at least as frequent as the infectious complications of IUC, with similar impact on LOS or morbidity. Prevention should focus on finding alternatives to IUC (for example, use of condom for men, assess the non-hourly diuresis), a strict compliance on known indication for IUC and hygiene, as well as to ask every day the possibility to withdraw the catheter.
Une sonde urinaire (SU) est posée à un quart des patients hospitalisés. La bactériurie est inéluctable, augmentant de 3 à 7 % par jour et affectant virtuellement tous les patients à un mois. De ces patients, 10 % vont devenir symptomatiques, avec à l’extrémité du spectre, la bactériémie, le choc septique et le décès. Les complications non infectieuses des SU sont moins étudiées mais tout aussi fréquentes, avec un impact similaire sur la durée de séjour et la morbidité. La prévention des complications des SU passe par la recherche d’autres possibilités (par exemple, étuis péniens, contrôle de la diurèse non horaire), un respect strict des indications aux SU et des règles d’hygiène lors de la manipulation du système, ainsi que par un souci quotidien d’effectuer le retrait des SU dont l’indication n’est plus justifiée.
Depuis la première description sur un papyrus égyptien, la technique du sondage urinaire s’est progressivement développée.1 Son essor a bénéficié du recours à des matériaux souples (latex) et du développement des cathéters auto-maintenus par un ballonnet intravésical (Dr Foley, 1929).
On estime que 25 % des patients sont sondés au cours de leur hospitalisation, soit 9 millions par an aux Etats-Unis (tableau 1).2,3 Un tiers des sondes urinaires (SU) sont posées en l’absence d’indication reconnue (tableau 2).4 Dans un tiers des cas, le médecin n’a pas connaissance de la présence d’une SU.4 En outre, les recommandations de la Société suisse de médecine interne générale sont claires, notamment via un point du top 5 des mesures Smarter Medicine : « Ne pas poser ou laisser en place une sonde urinaire uniquement pour des raisons de commodités (incontinence urinaire, surveillance de la diurèse) chez des patients en dehors des soins intensifs ».
Cet article fait la synthèse des connaissances actuelles des complications infectieuses et non infectieuses des SU et explore les principaux axes de prévention.
La mise en place d’une SU transforme un flux d’urine physiologiquement intermittent en un flux continu et entraîne la stase d’un résidu autour du ballonnet. Les matériaux engendrent la genèse d’un biofilm par les bactéries, favorisant leur développement et limitant l’accès aux antibiotiques, conditions propices au développement de résistances bactériennes.5
Une bactériurie asymptomatique (BA) se définit par la présence de bactéries dans l’urine en l’absence de symptômes ou signes cliniques. Chez le patient porteur d’une SU, le risque de développer une BA croît de 3 à 7 % par jour, concernant ainsi un quart des patients après sept jours et leur totalité à 30 jours.6,7 Comme la prévalence des BA est importante, il convient de réaliser une culture urinaire uniquement en cas de probabilité clinique suffisante d’infection urinaire sur sonde (CAUTI pour Catheter-associated urinary tract infection).7,8 Le diagnostic de CAUTI est rendu difficile, car les signes d’appel tels que la fièvre ou la dysurie sont fréquents et aspécifiques chez les porteurs de SU (irritation urétrale, spasmes vésicaux).9 Le sédiment urinaire peut également être perturbé en l’absence d’infection.5 Toutefois, l’absence de leucocyturie a une bonne valeur prédictive négative de CAUTI, tandis que sa présence est peu spécifique.10 Des critères diagnostiques quelque peu arbitraires et variables des CAUTI participent au risque de surtraitement des BA. Par exemple, en 2009, le changement des critères diagnostiques s’est suivi d’une réduction de moitié de l’incidence des cas déclarés, sans que d’autres mesures spécifiques ne soient entreprises pour changer le nombre réel de CAUTI.11,12
Parmi les BA en présence d’une sonde, seulement 10 % évolueront vers une CAUTI.2 Malgré ceci, l’infection urinaire est l’infection nosocomiale la plus fréquente (80 % sont liées aux sondes).5,13 Pour tout patient hospitalisé, le risque de mortalité global est doublé en cas de CAUTI, passant de 2,6 % en moyenne à 5,7 %.14 Dans le pire scénario (3,6 % des cas), une bactériurie se complique d’une bactériémie, alors associée à une mortalité de 15 à 30 % à 30 jours.7
Les deux facteurs de risque principaux de CAUTI sont la durée du sondage et le sexe féminin (urètre court). Les autres facteurs identifiés sont le sondage en dehors d’un environnement stérile (bloc opératoire), une infection concomitante, le diabète, la dénutrition et l’insuffisance rénale. Le risque est augmenté de façon importante quand le système collecteur est positionné au-dessus du niveau du patient, ce qui peut arriver lorsque le patient est transporté en lit. Il est diminué lors d’antibiothérapie, mais dans ce cas, les bactéries retrouvées sont souvent résistantes.5 Enfin, l’obstruction du cathéter est un élément favorisant les CAUTI.13
L’exposition à un antibiotique augmente le risque de résistance bactérienne et a un impact sur l’écologie microbienne. On estime que 60 à 80 % des patients sondés reçoivent une antibiothérapie lors de leur hospitalisation, la plupart du temps dans une indication non urinaire, mais aussi à la suite d’un diagnostic (confirmé ou non) de CAUTI. Aux Etats-Unis, les CAUTI sont la cause la plus fréquente de germes résistants en EMS et la source de plus de 60 % des entérobactéries avec carbapénémases.10 De plus, le risque de colite à Clostridium difficile augmente lors d’hospitalisation dans un environnement ayant servi précédemment à un patient exposé à des antibiotiques, même si ce dernier n’avait pas de colite clinique.15
La littérature médicale s’est concentrée sur les complications infectieuses des SU. Une méta-analyse récente de 37 études montre pourtant que la fréquence des complications non infectieuses est similaire, voire plus importante que celle des complications infectieuses, notamment lorsque l’on considère les sondages de plus de trois semaines.16
La durée du sondage augmente le risque d’obstruction du cathéter et d’hématurie d’environ 1,5 % par jour, tandis que les sténoses urétrales dépendent surtout de la technique d’insertion et de retrait (tableau 3).16 Les complications mécaniques, telles que les sténoses urétrales, vont, dans un tiers des cas, nécessiter un bilan ou une intervention chirurgicale.16 Ces événements augmentent la morbidité, le risque de CAUTI, la durée de séjour et les coûts.16
Les études comparant les différentes techniques de sondage sont rares et concernent surtout des patients souffrant d’une vessie neurogène.17 Les complications traumatiques semblent plus fréquentes avec le sondage transurétral à demeure qu’avec les sondages intermittents et moindre lors d’un sondage suspubien qui épargne les voies anatomiques.18
Le sondage impacte négativement la qualité de vie, la mobilité, ainsi que les coûts.19 Une CAUTI augmente de quatre jours en moyenne la durée du séjour et de 700 à 3750 USD la facture hospitalière.20,21
Le sondage comporte également un risque juridique pour les professionnels. Dans une étude américaine (où les recours juridiques sont plus fréquents qu’en Suisse), lors de procès pour complications sur SU, un tiers des jugements condamnaient les soignants avec un dédommagement moyen de 113 000 USD par patient. Les plaintes étaient dirigées à 36 % contre des médecins, 34 % contre l’institution, 20 % contre des infirmières et 6 % contre l’Etat. Un tiers des événements incriminés étaient de nature infectieuse contre deux tiers de complications mécaniques.22
Les quatre étapes du sondage urinaire (l’insertion, les soins, le retrait, et les réinsertions/changements) offrent autant d’opportunités théoriques de prévention. Les stratégies les mieux étudiées sont celles qui visent à réduire le nombre de SU et la durée du sondage. Si toutes les mesures étaient respectées, on estime que près de deux tiers des CAUTI pourraient être évitées.23
Sept à 50 % des sondages urinaires sont réalisés sans indication formelle (tableau 2).17,24 Les patients plus âgés ont trois fois plus de risques que les patients de moins de 50 ans de subir un sondage inapproprié, et les femmes un risque deux fois supérieur aux hommes.25
L’introduction de listes d’indications, d’aides informatiques à la prescription, ou d’un responsable formé garant du respect des indications a démontré une diminution d’un tiers du nombre de sondages inappropriés et de CAUTI26‑28 et une amélioration de l’efficience.29 L’utilisation de cathéters externes de type condoms (étui pénien) à la place de SU permet d’éviter une infection urinaire ou un décès pour 20 patients et offre au patient un bénéfice clair en qualité de vie.30 Cette alternative est encouragée chez les patients de sexe masculin souffrant d’incontinence, avec toutefois une réserve chez les patients atteints de démence chez qui le bénéfice est moindre.30 Les protections offrent aussi une alternative, bien que non dénuées de complications cutanées et souvent mal acceptées. Le contrôle du poids ou de la diurèse non horaire sont probablement aussi sûrs et parfois plus fiables que celui de la diurèse horaire avec SU pour le suivi des patients à l’étage.31 La diurèse horaire doit être réservée aux patients chez qui un changement thérapeutique est possible/nécessaire à la même fréquence que les contrôles, comme par exemple aux soins intensifs dans les situations de choc.
L’irrigation vésicale avec un antiseptique, l’instillation antibactérienne dans le sac collecteur d’urine, le nettoyage quotidien rigoureux du méat, l’utilisation de crèmes et de lubrifiants antiseptiques et les valves antireflux n’ont pas montré d’avantage significatif pour la réduction des CAUTI.32,33
Les recommandations actuelles sont de limiter les manipulations qui doivent être réalisées par un personnel compétent et suivant des règles d’hygiène strictes. Après la pose, le système « SU – sac collecteur » ne doit plus être ouvert (système clos) et les prélèvements d’urine se font à travers une chambre prévue à cet effet. Toute SU doit bénéficier d’une réévaluation, soit par une infirmière formée, soit par un ordre automatique de retrait émis au moment de la pose, qui nécessite ensuite une confirmation du médecin ou de l’infirmière pour ne pas effectuer le retrait de la SU. Ces stratégies permettent de diminuer le risque de CAUTI sans augmenter la survenue d’effets indésirables liés à un retrait précoce du cathéter.21,28,34
Malgré une population importante de patients dépendants au long cours d’une SU, deux méta-analyses récentes concluent à l’absence d’évidence pour proposer des recommandations quant aux modalités de soins ou changement des SU.
La première méta-analyse portant sur 31 études de faible qualité est non conclusive sur le bénéfice de l’utilisation de SU stériles versus propres (réutilisation de SU, pratique absente en Suisse mais courante aux Etats-Unis), sur l’utilisation des différents types de SU et sur le changement de la sonde par un professionnel ou par le patient lui-même.35 La deuxième méta-analyse relève un manque d’évidence (3 études, 107 patients) pour proposer des recommandations sur un intervalle d’un mois, à respecter entre les changements de SU versus libre, sur l’utilisation d’une antibiothérapie prophylactique ou sur l’utilisation de chlorhexidine versus NaCl lors du changement de SU pour diminuer les CAUTI.36 Il existe encore moins d’évidence sur le bénéfice de ces différentes modalités sur le risque de complication non infectieuse.
Les complications liées à la pose de SU sont fréquentes et peuvent entraîner une importante morbidité ainsi qu’une augmentation de la mortalité. Le principal moyen d’éviter les complications passe par le respect d’indications strictes. Les sondages intermittents ou sus-pubiens devraient être préférés pour les indications à long terme car ils semblent diminuer la fréquence de survenue des CAUTI. Dans tous les cas, une SU doit être retirée dès qu’il n’y a plus d’indication.
Malgré la reconnaissance du lien entre SU et de nombreuses complications, les recommandations peinent à s’installer durablement dans la pratique quotidienne. Parmi les barrières identifiées ressortent un manque d’implication du corps médical, l’insistance des patients (ou des proches) en cas d’incontinence, ainsi que les habitudes de service, notamment aux urgences.37 Les médecins ne se sentent pas suffisamment concernés, tandis que les équipes infirmières ne perçoivent pas toujours l’aspect invasif du sondage ou la sévérité des complications. De plus, les patients incontinents non sondés requièrent plus de temps pour les soins.37 Ces barrières doivent être prises en considération pour que la politique de prévention puisse aboutir à une diminution satisfaisante du nombre de complications liées à la pose de SU.
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.
▪ Une sonde urinaire (SU) est posée chez un patient hospitalisé sur quatre
▪ La bactériurie asymptomatique est inéluctable et peut se compliquer d’une infection parfois grave. Comme la bactériurie est fréquente, la culture d’urine doit être demandée uniquement dans les situations de probabilité suffisante d’infection urinaire sur sonde
▪ Les complications non infectieuses sont moins étudiées, mais tout aussi fréquentes que les complications infectieuses, avec un impact au moins similaire sur la morbidité
▪ La prévention passe par la recherche d’autres possibilités de prise en charge, un respect strict des indications aux SU et des règles d’hygiène, ainsi que par un souci quotidien d’effectuer le retrait des SU n’ayant plus d’indication
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