JE M'ABONNE DÈS AUJOURD'HUI
et j'accède à plus de contenu
ISO 690 | El-Khoury, J., W., Venetz, J., Rutz, T., Sciarra, A., Unger, S., Sempoux, C., Moradpour, D., Fraga, M., Syndrome d’Alagille, Rev Med Suisse, 2019/660 (Vol.15), p. 1506–1510. DOI: 10.53738/REVMED.2019.15.660.1506 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2019/revue-medicale-suisse-660/syndrome-d-alagille |
---|---|
MLA | El-Khoury, J., W., et al. Syndrome d’Alagille, Rev Med Suisse, Vol. 15, no. 660, 2019, pp. 1506–1510. |
APA | El-Khoury, J., W., Venetz, J., Rutz, T., Sciarra, A., Unger, S., Sempoux, C., Moradpour, D., Fraga, M. (2019), Syndrome d’Alagille, Rev Med Suisse, 15, no. 660, 1506–1510. https://doi.org/10.53738/REVMED.2019.15.660.1506 |
NLM | El-Khoury, J., W., et al.Syndrome d’Alagille. Rev Med Suisse. 2019; 15 (660): 1506–1510. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2019.15.660.1506 |
Exporter la citation | Zotero (.ris) EndNote (.enw) |
Alagille syndrome is a rare disorder with low physician awareness. It affects multiple organs and thus patient management involves several medical specialties. It is an autosomal dominant disorder with significant intrafamilial variability. The most frequent clinical manifestations are neonatal jaundice, chronic cholestasis as well as cardiac, ocular and skeletal malformations associated with characteristic facial features. Inherited mutations affect the Notch pathway. Although the molecular basis of Alagille syndrome is well defined, no specific targeted therapy exists.
Le syndrome d’Alagille est une pathologie rare et peu connue dans la pratique médicale. Il s’agit d’une affection multisystémique dont la prise en charge implique plusieurs spécialités médicales. Sa transmission se fait sur un mode autosomique dominant avec néanmoins une expression clinique très variable, au sein d’une même famille chez des sujets présentant une même mutation. Ses manifestations cliniques principales sont un ictère néonatal, une cholestase chronique, une atteinte cardiaque, oculaire, squelettique ainsi qu’un faciès caractéristique. Les diverses mutations identifiées et héritées affectent la voie de signalisation Notch. Bien que la physiopathologie soit actuellement relativement bien définie, aucune thérapie ciblée n’est à l’heure actuelle disponible.
Le syndrome d’Alagille (SALG) est également dénommé paucité ductulaire syndromique ou dysplasie artério-hépatique. Il a été décrit pour la première fois en 1969 par Daniel Alagille. La forme syndromique complète associe un ictère néonatal, une cholestase chronique, une atteinte cardiaque, oculaire, squelettique et un faciès caractéristique.1, 2 Il s’agit d’une affection héréditaire rare à transmission autosomique dominante. Les diverses mutations génétiques identifiées et héritées affectent la voie de signalisation Notch. Sa prévalence est estimée à 1/100 000 naissances sans prédominance de sexe.1 Le pronostic dépend principalement de la gravité de l’atteinte hépatique et de l’importance des malformations cardiaques.
Les gènes impliqués dans le SALG touchent l’importante voie de signalisation Notch, essentielle au développement de multiples organes lors de l’embryogenèse (figure 1).3 Il s’agit d’une voie de signalisation regroupant un ensemble de ligands et de récepteurs spécifiques dont la liaison induit l’activation d’une cascade moléculaire intracellulaire avec transcription de gènes cibles.4
Des anomalies hétérozygotes (mutations ponctuelles ou délétions) dans le gène JAG1 sont responsables d’environ 95 % des cas.5 1 à 2 % des cas sont expliqués par des mutations dans Notch2.6 Le mode de transmission est autosomique dominant. Néanmoins, dans 50 à 70 % des cas, il s’agit de mutations de novo. La plupart des mutations sont tronquantes ou délétionnelles et mènent à des protéines Jagged ou Notch non fonctionnelles. Le phénotype est donc probablement lié à une insuffisance haploïde, c’est-à-dire à un produit protéique insuffisant pour assurer la fonction de régulation de transcription des gènes cibles.7 La variabilité phénotypique importante au sein d’une même famille est une caractéristique du SALG.6
Les manifestations cliniques du SALG sont résumées dans le tableau 1, dont la première partie concerne les atteintes principales du SALG. La deuxième résume les atteintes secondaires, plus rares, en cas de SALG.
Il s’agit de l’une des manifestations principales du SALG.8 -10 Elle se présente sous la forme d’un ictère néonatal avec installation progressive d’une cholestase ictérique durant les 3 premiers mois de vie chez 45 à 75 % des patients, associée à des épisodes de rémissions anictériques. Il existe une grande variabilité phénotypique expliquant une sévérité variable de cette cholestase. Dans 30 % des cas, on assistera au développement d’une cirrhose biliaire secondaire. Ce risque augmente avec l’âge et la sévérité de la cholestase.
Au niveau histologique (figure 2), l’atteinte caractéristique est l’absence des canaux biliaires interlobulaires. Celle-ci s’associe à des signes indirects de cholestase (nombreux hé
patocytes périportaux réexprimant la cytokératine 7, certains comportant aussi des dépôts de protéine liée au cuivre), en l’absence de toute réaction ductulaire (figures 2A et 2B). La fibrose est présente à des degrés variables pouvant aller jusqu’à la formation de ponts étendus (figure 2C), avec développement, plus rare, d’une cirrhose biliaire secondaire.
Sur le plan clinique, cette atteinte biliaire est responsable d’une rétention d’acides biliaires et de cholestérol9, 10 associée à un prurit, une malabsorption des lipides ainsi que des vitamines liposolubles avec développement secondaire d’une dénutrition ainsi qu’à un retard de croissance. On décrit également des xanthomes cutanés qui ont tendance à disparaître vers l’âge de 10 ans. Le prurit est rarement présent avant les 5 premiers mois de la vie. Il est parfois difficilement contrôlable et est alors responsable d’une baisse importante de la qualité de vie, du sommeil et des capacités scolaires. Il est souvent persistant même en l’absence d’ictère. Il peut, à lui seul, justifier une transplantation hépatique.
Les anomalies cardiaques sont présentes dans 85 à 95 % des cas.8, 11 Elles conditionnent le pronostic au long cours, surtout en bas âge. L’atteinte principale est une sténose de l’arbre pulmonaire, touchant surtout les artères pulmonaires proximales et périphériques8, 11 avec, dans 12,5 % des cas, une hypoplasie de tout l’arbre vasculaire pulmonaire. La cardiopathie congénitale complexe la plus fréquemment associée au SALG est la tétralogie de Fallot, présente dans 8 à 12 % des cas11 et associée à une mortalité accrue. D’autres anomalies sont souvent associées dont la communication interventriculaire et interauriculaire, la coarctation de l’aorte, les anomalies des artères coronaires et la sténose aortique. La coexistence de cardiopathies touchant le cœur gauche et droit est une caractéristique typique du SALG.11 Par exemple, l’association d’une tétralogie de Fallot et d’une sténose aortique devrait motiver la recherche d’un SALG.12 La haute prévalence de l’atteinte cardiaque dans le SALG est expliquée par l’implication de la voie de signalisation Notch et particulièrement de la protéine Jagged dans le développement des artères pulmonaires, des septums atrial et ventriculaire et des chambres de chasse ventriculaire.13
L’embryotoxon postérieur est la manifestation oculaire la plus caractéristique. Il s’agit d’une proéminence anormale de la ligne de Schwalbe visible sous forme d’une ligne blanche à l’intérieur du limbe, présente dans 56 à 95 % des cas. Elle n’interfère pas avec la vision.8 Des anomalies de l’iris et du disque optique (drusen de la papille) ainsi qu’une rétinopathie pigmentaire peuvent également être observées, nécessitant un suivi ophtalmologique.14
L’anomalie vertébrale la plus caractéristique est la vertèbre dite en ailes de papillon.1, 8 Elle est due à l’absence de fusion des arcs vertébraux antérieurs résultant en une division sagittale du corps vertébral en 2 hémi-vertèbres triangulaires, disposées face à face comme les ailes d’un papillon. D’autres anomalies squelettiques sont également décrites mais plus rares (macrocéphalie, petites phalanges).
L’ostéoporose est l’une des complications de la cholestase chronique ainsi que de la dénutrition. Elle s’associe souvent à des fractures pathologiques.
Généralement, le faciès est caractéristique. Il s’avère aisément reconnaissable dès l’âge de 5 ans.8 On retrouve un visage triangulaire, un front bombant, des yeux enfoncés avec hypertélorisme, une racine de nez aplatie, un nez droit, un petit menton pointu et projeté en avant.
Bien que l’atteinte rénale ne fasse pas partie des critères définissant le SALG, elle est courante et peut mener à une insuffisance rénale terminale. Sa prévalence varie de 19 à 74 %. Dans la série la plus récente,15 elle est de 39 % avec, dans 50 % de ces cas, une insuffisance rénale chronique (IRC). L’origine la plus fréquente de l’atteinte rénale est une dysplasie. Cette observation peut s’expliquer par l’implication de Jagged et Notch dans la formation de la partie proximale des néphrons et des podocytes.16 La dysplasie peut être généralisée, focale, associée ou non à des kystes rénaux ou à des malformations des voies urinaires (reflux vésico-urétéral, sténose). Des atteintes rénovasculaires sont aussi décrites en rapport avec des sténoses des artères rénales.1, 12 Enfin les glomérules peuvent être touchés sous forme d’une mésangiolipidose.17 Sur le plan fonctionnel, une acidose rénale tubulaire est relativement fréquente, de l’ordre de 9,5 % dans certaines séries. Il est important de la rechercher car elle peut participer au retard de croissance staturo-pondéral des enfants atteints de SALG. Elle est, de plus, facile à traiter. Rarement, le phénotype du SALG peut être dominé par l’atteinte rénale et être découvert à l’âge adulte dans le cadre d’un bilan d’une IRC.18
La dénutrition est responsable d’une morbidité élevée. Elle s’associe à des complications métaboliques, infectieuses et intellectuelles.1, 8 Le retard mental, décrit dans les premières publications sur le SALG,1 est de nos jours très rare grâce à une prise en charge nutritionnelle précoce et adaptée.
L’hémorragie intracrânienne est une complication fatale dans 30 à 50 % des cas8 et survient chez 10 à 25 % des patients sans facteur déclenchant. Elle peut être épidurale, sous-durale, sous-arachnoïdienne ou intraparenchymateuse.2 Elle est liée d’une part à des anévrismes artériels et d’autre part à une vasculopathie de type moyamoya.19 La plupart des équipes pédiatriques recommandent donc une IRM cérébrale dans le cadre du suivi des patients atteints du SALG.
Le SALG comprend également d’autres atteintes possibles mais plus rares, touchant les systèmes respiratoire, digestif, ORL ou encore endocrinien qui sont résumées dans le tableau 1. Ces patients présentent notamment une voie aiguë caractéristique du SALG.
Un diagnostic précoce est essentiel pour améliorer la prise en charge et le pronostic du SALG. Celui-ci est parfois difficile en raison de la grande variabilité phénotypique ainsi que de la faible reconnaissance du SALG. Le diagnostic est établi si l’atteinte hépatique est associée à 3 des 4 atteintes suivantes: cardiaque, vertébrale, ophtalmique et faciale.1, 20 Les personnes ne remplissant pas l’ensemble des 3 critères diagnostiques mais ayant un proche atteint d’un SALG, sont également reconnues comme atteintes.
La démarche diagnostique pour le SALG est résumée dans l’algorithme de la figure 3. La suite du bilan initial est résumée dans le tableau 1.
La biopsie hépatique, bien que rarement effectuée dans un but diagnostique, peut confirmer le diagnostic de SALG. La cholangio-IRM constitue une aide au diagnostic du fait que 74 % des patients n’ont pas de canaux biliaires intrahépatiques visibles; en revanche, elle n’est également pas un examen de premier choix en cas de présentation typique de SALG.
L’analyse génétique permettra de confirmer le diagnostic par l’analyse moléculaire des gènes JAG1 ou NOTCH2. Elle permet également de confirmer définitivement le diagnostic et d’orienter le conseil génétique de tout patient affecté par le SALG.
Bien que les voies moléculaires causales soient bien établies, il n’existe malheureusement pas encore de traitement spécifique. Les thérapies actuelles sont exclusivement symptomatiques. La prise en charge nutritionnelle est primordiale. Elle comprend un régime hypercalorique avec supplémentation en triglycérides à chaînes moyennes et en vitamines liposolubles.
Sur le plan hépatique, les objectifs sont la diminution de la cholestase et le contrôle du prurit. L’acide ursodésoxycholique est le traitement de première intention.20 Concernant le prurit, les recommandations sont similaires à celles d’autres pathologies cholestatiques. Les résines échangeuses d’ions non absorbables (cholestyramine) sont notamment utilisées.21
La transplantation hépatique est l’option thérapeutique la plus efficace et le premier choix pour le prurit réfractaire, également en l’absence de cirrhose. Elle est nécessaire chez 21 à 50 % des patients. Le taux de survie est excellent. Ses principales indications sont l’insuffisance hépatocellulaire, l’hypertension portale, l’encéphalopathie, le prurit réfractaire, l’ostéodystrophie, le retard de croissance staturo-pondéral sévère et les cholangites récurrentes.9, 22, 23 Le carcinome hépatocellulaire est rare, notamment dans l’enfance.
Une fonction rénale altérée peut également poser l’indication à une transplantation rénale concomitante ou après la greffe hépatique. Les atteintes rénale et vasculaire sont traitées symptomatiquement.
En raison de la prévalence élevée des cardiopathies congénitales, chaque patient nécessite une évaluation cardiaque au moment du diagnostic. Le suivi cardiologique dépendra de la sévérité de l’atteinte cardiaque. Il va de la simple surveillance échocardiographique à une prise en charge interventionnelle ou chirurgicale qui seront discutées dans un centre d’expertise. Un suivi cardiologique régulier est primordial.
La dilatation percutanée par ballon avec ou sans implantation d’un stent est généralement la méthode de choix pour le traitement des sténoses focales des artères pulmonaires.24 Les patients atteints d’une cardiopathie congénitale complexe comme la tétralogie de Fallot vont subir une correction chirurgicale usuelle rapidement après la naissance et feront l’objet d’un suivi cardiologique à vie en raison des complications à long terme.25
Le SALG est une pathologie à transmission génétique autosomique dominante. L’identification de la mutation causale du gène JAG1 a révolutionné la compréhension de ce syndrome. L’expression phénotypique variable est responsable d’un large spectre de présentations cliniques avec des atteintes multi-systémiques. Le diagnostic doit absolument être évoqué précocement afin d’améliorer le pronostic de ces patients. Il repose, ainsi que sa prise en charge, sur une collaboration pluridisciplinaire.
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.
Les auteurs remercient vivement la Dre Nathalie Rock pour sarelecture attentive et ses commentaires avisés.
▪ Le syndrome d’Alagille associe une atteinte multiorganique touchant le foie, le cœur, les reins, les systèmes vasculaires, oculaires et osseux
▪ Il est caractérisé par une paucité ductulaire hépatique engendrant une cholestase chronique, se compliquant d’un prurit, d’une dénutrition, de xanthomes cutanés étendus ainsi que d’une fibrose hépatique allant jusqu’à la cirrhose
▪ Le traitement médical est symptomatique. La prise en charge est centrée sur le prurit, la dénutrition et l’atteinte cardiorénale
▪ La transplantation hépatique est indiquée en cas de cirrhose avec insuffisance hépatocellulaire, de carcinome hépatocellulaire ou encore de prurit réfractaire au traitement médical
Le produit a bien été ajouté au panier ! Vous pouvez continuer votre visite ou accéder au panier pour finaliser votre commande.
Veuillez entrer votre adresse email ci-dessous pour recevoir un lien de réinitialisation de mot de passe
Vous pouvez créer votre nouveau mot de passe ici
Certains de ces cookies sont essentiels, tandis que d'autres nous aident à améliorer votre expérience en vous fournissant des informations sur la manière dont le site est utilisé.
Les cookies nécessaires activent la fonctionnalité principale. Le site Web ne peut pas fonctionner correctement sans ces cookies et ne peut être désactivé qu'en modifiant les préférences de votre navigateur.
Ces cookies permettent d’obtenir des statistiques de fréquentation anonymes du site de la Revue Médicale Suisse afin d’optimiser son ergonomie, sa navigation et ses contenus. En désactivant ces cookies, nous ne pourrons pas analyser le trafic du site de la Revue Médicale Suisse
Ces cookies permettent à la Revue Médicale Suisse ou à ses partenaires de vous présenter les publicités les plus pertinentes et les plus adaptées à vos centres d’intérêt en fonction de votre navigation sur le site. En désactivant ces cookies, des publicités sans lien avec vos centres d’intérêt supposés vous seront proposées sur le site.
Ces cookies permettent d’interagir depuis le site de la Revue Médicale Suisse avec les modules sociaux et de partager les contenus du site avec d’autres personnes ou de les informer de votre consultation, lorsque vous cliquez sur les fonctionnalités de partage de Facebook et de Twitter, par exemple. En désactivant ces cookies, vous ne pourrez plus partager les articles de la Revue Médicale Suisse depuis le site de la Revue Médicale Suisse sur les réseaux sociaux.